J'ai plus de souvenirs que si j'avais mille ans. Un gros meuble à tiroirs encombré de bilans, De vers, de billets doux, de procès, de romances, Avec de lourds cheveux roulés dans des quittances, Cache moins de secrets que mon triste cerveau. C'est une pyramide, un immense caveau, Qui contient plus de morts que la fosse commune. — Je suis un cimetière abhorré de la lune, Où comme des remords se traînent de longs vers Qui s'acharnent toujours sur mes morts les plus chers. Je suis un vieux boudoir plein de roses fanées, Où gît tout un fouillis de modes surannées, Où les pastels plaintifs et les pâles Boucher Hument le vieux parfum d'un flacon débouché. Rien n'égale en longueur les boiteuses journées, Quand sous les lourds flocons des neigeuses années L'ennui, fruit de la morne incuriosité, Prend les proportions de l'immortalité. — Désormais tu n'es plus, ô matière vivante, Qu'un granit entouré d'une vague épouvante, Assoupi dans le fond d'un Saharah brumeux, — Un vieux sphinx ignoré du monde insoucieux, Oublié sur la carte, et dont l'humeur farouche Ne chante qu'aux rayons du soleil qui se couche.
F. Farkas sets lines 1-5, 8-10
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View text with all available footnotesConfirmed with Charles Baudelaire, Les Fleurs du mal, Paris: Poulet-Malassis et de Broise, 1857, in Spleen et Idéal, pages 140-141. Also confirmed with Charles Baudelaire, Les Fleurs du mal, Paris: Poulet-Malassis et de Broise, 1861, in Spleen et Idéal, pages 172-173. Also confirmed with Charles Baudelaire, Œuvres complètes de Charles Baudelaire, vol. I : Les Fleurs du mal, Paris: Michel Lévy frères, 1868, in Spleen et Idéal, page 199-200. Punctuation and formatting follows 1857 edition. Note: this was number 60 in the 1857 edition of Les Fleurs du mal but number 76 or 78 in subsequent editions.
Note: The stanzas breaks and number of stanzas in the 1868 version of the poem differ from the 1857 and 1861 versions. There are two additional stanza breaks in the 1868 edition: one between "Qui contient plus de morts que la fosse commune" and "Je suis un cimetière abhorré de la lune", and another between "Prend les proportions de l'immortalité" and "Désormais tu n'es plus, ô matière vivante".
Authorship:
- by Charles Baudelaire (1821 - 1867), "Spleen", appears in Les Fleurs du mal, in 1. Spleen et Idéal, no. 60, Paris, Poulet-Malassis et de Broise, first published 1857 [author's text checked 4 times against a primary source]
Musical settings (art songs, Lieder, mélodies, (etc.), choral pieces, and other vocal works set to this text), listed by composer (not necessarily exhaustive):
- by Gilles Auger (b. 1957), "Spleen 2", 2009 [ medium voice (male voice) and piano ], from Spleen, no. 2 [sung text not yet checked]
- by Ferenc Farkas (1905 - 2000), "Spleen", 1997, lines 1-5,8-10 [ low voice and piano ] [sung text not yet checked]
Available translations, adaptations or excerpts, and transliterations (if applicable):
- CZE Czech (Čeština) (Jaroslav Goll) , "Spleen (1)"
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