Je vous présente Arthur
C'est une belle chaussure
Personne ne veut plus l'acheter, c'est insensé !
Pourtant notr' Arthur
Est une bonne pointure
Un solide cuir bien tanné, bien conservé.

Si seul et, se sentant abandonné
Près d'une poubelle il sanglotait
Comment faire pour un jour retrouver
Le frère avec lequel il faisait la paire

C'est alors qu'Arthur
Comme toute bonne chaussure
Sur la pointe du pied s'en alla, à petits pas
Quelle aventure
Pour une jeune chaussure
D'accomplir seule ses premiers pas, c'est un exploit !

Soudain, au détour d'un vieux pavé
Deux belles bottines lui firent du pied
Elles avaient le chic des italiennes
Et le sourire grand jusqu'aux orteils

A une vive allure
De chaussure en chaussure
Il cherchait son vieux frère Prosper, très terre à terre
On vit mêm' des voitures
Stopper d'vant la chaussure
Traversant au passage clouté, d'un air pressé

Arthur parlait la langue de Molière
Mais pas aussi bien que Prosper
Il entendit la voix de son frère
Réciter des marches militaires

Notre ami Arthur
Frémissant des coutures
Rentra dans un vieux café gris, où il revit
Son frère Prosper
En tenue militaires
Bien ciré, les lacets bien noués,
très distingué

Il portait le pied d'un vieux militaire
Qui perdit l'autre pied à la guerre
Les deux frères pleins de larmes s'enlacèrent
Arthur ne quittera jamais plus son frère

Prosper et Arthur
Une paire de chaussures
Au service d'un vieux militaire, héros de la guerre
Il avait fière allure
Avec ses deux chaussures
Un unijambiste à deux pieds, on croit rêver !