by Gabriel Vicaire (1849 - 1900)
Pauvre Lise
Language: French (Français)
Avant-hier, la pauvre Lise, Sans crier gare, a trépassé. Elle est au milieu de l’église Sur un tréteau qu’on a dressé. Elle est en face de la Vierge, Elle qui pécha tant de fois. À ses pieds fume un petit cierge Dans un long chandelier de bois. Les gens qui sortent de confesse Ont grand’hâte de s’en aller, Et le curé bâcle sa messe: Son déjeuner pourrait brûler. Aux malheureux courte prière; Ça ne rapporte quasi rien. Pas une âme autour de la bière; On dirait qu’on enterre un chien. Seul, à genoux près de la porte, Je regarde et je n’ose entrer. Je pense aux cheveux de la morte Que le soleil venait dorer, À ses yeux bleu de violette, Si doux alors que je l’aimais, A sa bouche aujourd’hui muette Et qui ne rira plus jamais. Toute ma vie est en déroute. À chaque coup du glas des morts, Comme un peuplier sur la route Mon âme tremble dans mon corps. Ah! pauvre belle, au temps des fèves, Comme tu m’embrassais pourtant! Quelle misère! Où sont les rêves Qui nous rendaient le coeur content? Toi qu’on disait la plus frisquette Des filles de Château-Gaillard, Ta dernière chemise est faite De quatre planches de fayard. Adieu, branle-bas et bombances, Adieu la fleur de nos chansons! Tu n’iras plus, aux folles danses, Marcher sur le pied des garçons! Ton bras, plus ferme que l’ivoire, Comme un chardon s’est desséché; Ta gorge ronde est aussi noire Que l’image de ton péché; Tes lèvres, fleurant comme roses, Où l’amour menait si grand bruit, Tes lèvres sont à jamais closes; Tes yeux moqueurs sont dans la nuit. Ta jeunesse s’est consumée Comme un feu de pâtre en plein bois, Tu t’en vas comme la fumée Qui s’éparpille autour des toits. Dis-moi, pauvre âme abandonnée, As-tu déjà vu le bon Dieu? Au puits d’enfer es-tu damnée? As-tu mis la robe de feu? As-tu mis le camail de soufre Et la mitre de plomb fumant? Parle, parle. Est-ce vrai qu’on souffre Mille morts éternellement? S’il ne te faut qu’une neuvaine Pour sortir du mauvais chemin, Pour vêtir la cape de laine, Je n’attendrai pas à demain. Traversant forêts et rivières, Les pieds saignants, le coeur navré, À Notre-Dame de Fourvières, Pénitent noir, je m’en irai. Bienheureux le pauvre qui touche Les grains d’or de son chapelet! Elle peut d’un mot de sa bouche Nous rendre blancs comme le lait, Elle peut d’un signe de tête Effacer notre iniquité. Je lui donnerai pour sa fête Manteau d’hiver, manteau d’été; Et, quand viendra la grande foire, Je veux offrir à son Jésus Un moulin aux ailes d’ivoire, Pour qu’il rie en soufflant dessus.
M. Trémois sets stanzas 1-4, 9-14, 27-34, 37-40
Text Authorship:
- by Gabriel Vicaire (1849 - 1900), "Pauvre Lise", appears in Émaux Bressans [author's text checked 1 time against a primary source]
Musical settings (art songs, Lieder, mélodies, (etc.), choral pieces, and other vocal works set to this text), listed by composer (not necessarily exhaustive):
- by Marcel Trémois (1891 - 1974), "Pauvre Lise", stanzas 1-4,9-14,27-34,37-40 [ medium voice and piano ], Éd. Néocopie musicale [sung text not yet checked]
Researcher for this text: Emily Ezust [Administrator]
This text was added to the website: 2023-02-09
Line count: 80
Word count: 446