by Pierre Jean de Béranger (1780 - 1857)
Le Juif‑Errant
Language: French (Français)
Chrétien, au voyageur souffrant Tends un verre d'eau sur ta porte : Je suis, je suis le Juif-Errant, Qu'un tourbillon toujours emporte. (Bis) Sans vieillir, accablé de jours, La fin du monde est mon seul rêve. Chaque soir j'espère toujours : [Mais]1 toujours le soleil se lève. Toujours, toujours, (Bis) Tourne la terre où moi je cours, Toujours, toujours, toujours, toujours. Depuis dix-huit siècles, hélas ! Sur la cendre grecque et romaine, Sur les débris de mille États, L'affreux tourbillon me promène : J'ai vu sans fruit germer le bien, Vu des calamités fécondes ; Et, pour survivre au monde ancien, Des flots j'ai vu sortir deux mondes. Toujours, toujours, Tourne la terre où moi je cours, Toujours, toujours, toujours, toujours. Dieu m'a changé pour me punir : A tout ce qui meurt je m'attache. Mais du toit prêt à me bénir Le tourbillon souvent m'arrache. Plus d'un pauvre vient implorer Le denier que je puis répandre, Qui n'a pas le temps de serrer La main qu'en passant j'aime à lendre. Toujours, toujours, Tourne la terre où moi je cours, Toujours, toujours, toujours, toujours. Seul, au pied d'arbustes en fleurs, Sur le gazon, au bord de l'onde, Si je repose mes douleurs, J'entends le tourbillon qui gronde. [Eh !]2 qu'importe au ciel irrité Cet instant passé sous l'ombrage ? Faut-il moins que l'éternité Pour délasser d'un tel voyage ? Toujours, toujours, Tourne la terre où moi je cours, Toujours, toujours, toujours, toujours. Que des enfants vifs et joyeux Des miens me retracent l'image ; Si j'en veux repaître mes yeux, Le tourbillon souffle avec rage. Vieillards, osez-vous à tout prix M'envier ma longue carrière ? Ces enfants à qui je souris, Mon pied balaiera leur poussière. Toujours, toujours, Tourne la terre où moi je cours, Toujours, toujours, toujours, toujours. Des murs où je suis né jadis Retrouvé-je encor quelque trace ? Pour m'arrêter je me roidis ; Mais le tourbillon me dit : « Passe ! « Passe ! » Et la voix me crie aussi : « Reste debout quand tout succombe. « Tes aïeux ne m'ont point ici « Gardé de place dans leur tombe. » Toujours, toujours, Tourne la terre où moi je cours, Toujours, toujours, toujours, toujours. J'outrageai d'un rire inhumain L'Homme-Dieu respirant à peine ... Mais sous mes pas fuit le chemin... Adieu, le tourbillon m'entraine. Vous qui manquez de charité, Tremblez à mon supplice étrange : Ce n'est pas sa divinité, C'est l'humanité que Dieu venge. Toujours, toujours, (Bis) Tourne la terre où moi je cours, Toujours, toujours, toujours, toujours.
C. Gounod sets stanzas 1, 4, 7
E. Doré sets stanzas 1, 3, 6-7
Confirmed with Œuvres complètes de P. J. de Béranger, Tome premier, Paris, Perrotin, 1858, pages 238-240.
1 Gounod: "Et"2 Gounod: "Mais"
Text Authorship:
- by Pierre Jean de Béranger (1780 - 1857), "Le Juif-Errant" [author's text checked 1 time against a primary source]
Musical settings (art songs, Lieder, mélodies, (etc.), choral pieces, and other vocal works set to this text), listed by composer (not necessarily exhaustive):
- by Ernest Doré (1830 - 1884), "Le Juif errant", op. 10, published [1854], stanzas 1,3,6-7 [ low voice and piano ], Paris, Éd. 'Au Ménestrel' Heugel [sung text not yet checked]
- by Charles Gounod (1818 - 1893), "Le Juif-Errant", CG 396 (1848?), published 1874, first performed 1861, stanzas 1,4,7 [ voice and orchestra ] [sung text checked 1 time]
Researcher for this text: Emily Ezust [Administrator]
This text was added to the website between May 1995 and September 2003.
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