by Victor Hugo (1802 - 1885)
Souvenir des vieilles guerres
Language: French (Français)
Pour la France et la république, En Navarre nous nous battions. Là parfois la balle est oblique, Tous les rocs sont des bastions. Notre chef, une barbe grise Le capitaine, était tombé, Ayant reçu près d’une église Le coup de fusil d’un abbé. La blessure parut malsaine. C’était un vieux et fier garçon. En France, à Marine-sur-Seine, On peut voir encor sa maison. On emporta le capitaine Dont on sentait plier les os ; On l’assit près d’une fontaine D’où s’envolèrent les oiseaux. Nous lui criâmes : — Guerre ! fête ! Forçons le camp ! prenons le fort ! — Mais il laissa pencher sa tête, Et nous vîmes qu’il était mort. L’aide-major avec sa trousse N’y put rien faire et s’en alla ; Nous ramassâmes de la mousse, De grands vieux chênes étaient là. On fit au mort une jonchée De fleurs et de branches de houx ; Sa bouche n’était point lâchée, Son œil intrépide était doux. L’abbé fut pris. — Qu’on nous l’amène ! Qu’il meure ! — On forma le carré ; Mais on vit que le capitaine Voulait faire grâce au curé. On chassa du pied le jésuite ; Et le mort semblait dire : Assez ! Quoiqu’il dût regretter la suite De nos grands combats commencés. Il avait sans doute à Marine Quelques bons vieux amours tremblants ; Nous trouvâmes sur sa poitrine Une boucle de cheveux blancs. Une fosse lui fut creusée À la bayonnette, en priant ; Puis on laissa sous la rosée Dormir ce brave souriant. Le bataillon reprit sa marche, À la brune, entre chien et loup ; Nous marchions. Les ponts n’ont qu’une arche. Des pâtres au loin sont debout. La montagne est assez maussade ; La nuit est froide et le jour chaud ; Et l’on rencontre l’embrassade Des grands ours de huit pieds de haut. L’homme en ces monts naît trabucaire ; Prendre et pendre est tout l’alphabet ; Et tout se règle avec l’équerre Que font les deux bras du gibet. On est bandit en paix, en guerre On s’appelle guérillero. Le peuple au roi laisse tout faire ; Cet ânier mène ce taureau. Dans les ravins, dans les rigoles Que creusent les eaux et les ans, De longues files d’espingoles Rampaient comme des vers luisants. Nous tenions tous nos armes prêtes À cause des pièges du soir. Le croissant brillait sur nos têtes, Et nous, pensifs, nous croyions voir, Tout en cheminant dans la plaine Vers Pampelune et Teruel, Le hausse-col du capitaine Qui reparaissait dans le ciel.
J. Altès sets stanzas 1-7, 10-12, 17-18
Confirmed with Victor Hugo, Œuvres complètes : Les Chansons des rues et des bois, Volume 30, Paris, Ollendorf, 1933, pages 246-248.
Text Authorship:
- by Victor Hugo (1802 - 1885), "Souvenir des vieilles guerres", written 1859, appears in Les Chansons des rues et des bois, in 2. Livre deuxième : Sagesse, in 3. Liberté, Egalité, Fraternité, no. 4 [author's text checked 1 time against a primary source]
Musical settings (art songs, Lieder, mélodies, (etc.), choral pieces, and other vocal works set to this text), listed by composer (not necessarily exhaustive):
- by Joseph Henry Altès (1826 - 1895), "Souvenir des vieilles guerres", op. 26 no. 11, published [1865?], stanzas 1-7,10-12,17-18 [ voice and piano or orchestra ], from 15 Mélodies, no. 11, Paris, Éd. Simon Richault [sung text not yet checked]
Researcher for this text: Emily Ezust [Administrator]
This text was added to the website: 2019-04-22
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