Dors, mon cœur, car sur terre
Tout devient maintenant étrange et calme !
Là-haut des hardes d'or défilent,
Le berger veille sur nous tous.

Des orages passent au-loin ;
Seul sur le frêle esquif,
Je prends ma cithare dehors,
Car je suis oppressé et anxieux.

Se faufilant parmi arbres et rameaux
Jusqu'à ta petite chambre,
Comme sur une échelle d'or,
Mes notes montent et descendent.

Et un ravissant garçon
Navigue haut par-dessus vallées et ravins,
Et de sa baguette d'or il crée 
Un frémissement dans l'air tiède.

Et d'une façon merveilleuse
Il chante un très vieil air
Qui, en fragiles cercles magiques
S'échappe derrière son esquif.

[Ah, la douce mélodie est transportée]1
Au- loin par le vent lascif,
Et à-travers serrures et murs,
[Chaque bel enfant l'entend]2 dans son rêve.

On entendait déjà les cloches du soir
Dans la vallée silencieuse,
Nous nous étions assis ensemble
Bien cent fois, là-haut,

Et en-bas tout était silence
De par le pays tout entier,
Seul le tilleul au-dessus de nous
Bruissait dans la solitude.

Que me veulent les cloches aujourd'hui,
C'est comme si je devais pleurer ?
Les cloches veulent dire
Que mon amour est mort !

Je voudrais être enterré
Et que loin au-dessus de moi bruisse,
Chaque soir le tilleul
Des belles heures d'autrefois.