Dors, petit enfant, dans ton lit bien clos : Dieu prenne en pitié les matelots ! - Chante ta chanson, chante, bonne vieille ! La lune se lève et la mer s'éveille. Quand tu seras mousse, hélas ! c'est le vent Qui te bercera dans ton lit mouvant. - Chante ta chanson, chante, bonne vieille ! La lune se lève et la mer s'éveille. Déjà dans ton âme a chanté la mer Son chant doux aux fils, aux mères amer. - Chante ta chanson, chante, bonne vieille ! La lune se lève et la mer s'éveille. Au Pays du Froid, ton père a sombré. Tu naissais alors, je n'ai pas pleuré. - Chante ta chanson, chante, bonne vieille ! La lune se lève et la mer s'éveille. Au pays du Froid, la boule des fiords Chante sa berceuse en berçant les morts. - Chante ta chanson, chante, bonne vieille ! La lune se lève et la mer s'éveille. Dors, petit enfant, dans ton lit bien doux, Car tu t'en iras comme ils s'en vont tous. - Chante ta chanson, chante, bonne vieille ! La lune se lève et la mer s'éveille. Tes yeux ont déjà la couleur des flots. Dieu prenne en pitié les bons matelots ! - Chante ta chanson, chante, bonne vieille ! La lune se lève et la mer s'éveille. Car c'est pour les flots que nous enfantons, Tous meurent marins, qui sont nés Bretons.
La Chanson de la Bretagne
Song Cycle by Louis-Albert Bourgault-Ducoudray (1840 - 1910)
1. Berceuse d'Armorique  [sung text not yet checked]
Language: French (Français)
Text Authorship:
- by Anatole le Braz (1859 - 1926), "Berceuse d'Armorique", appears in La chanson de la Bretagne, Paris, Éd. H. Caillère, first published 1892
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Researcher for this page: Ferdinando Albeggiani2. Dans la grand'hune  [sung text not yet checked]
Language: French (Français)
La mer m’a versé son breuvage, Son lait, salé d’un sel amer ; Et j’ai grandi comme un sauvage Sur le sein libre de la mer. La mer de ses rudes caresses A pétri mon cœur et ma chair ; Ce sont de farouches tendresses Que les tendresses de la mer. La mer m’a chanté l’aventure, L’espace, la vie au grand air. Je suis un goéland de mâture, Un goéland, fils de la mer ! Et si, dans ma chambre bretonne, Un souffle passe, large et fier, C’est qu’en moi gémit, hurle et tonne L’âme innombrable de la mer.
Text Authorship:
- by Anatole le Braz (1859 - 1926), "Dans la grand'hune", appears in La chanson de la Bretagne, Paris, Éd. H. Caillère, first published 1892
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Researcher for this text: Emily Ezust [Administrator]3. Nuit d'étoiles  [sung text not yet checked]
Language: French (Français)
Voici venir la calme nuit ! La terre en est comme bercée ; Hors de nous elle éteint le bruit, En nous elle endort la pensée ! Voici venir la calme nuit. Les bois s’emplissent de mystère, Comme si Dieu subitement Leur faisait signe de se taire Pour écouter le firmament. Les bois s’emplissent de mystère. Les étoiles viennent et vont, Comme des flambeaux qu’on promène ; Leur regard magique et profond Semble veiller l’angoisse humaine. Les étoiles viennent et vont. Une pitié douce est en elles Pour les peines dont nous souffrons ; Elles se penchent, maternelles, Sur la tristesse de nos fronts. Une pitié douce est en elles. Étoiles, étoiles des cieux, Regards des morts que nous aimâmes, Si Dieu laissait mourir vos yeux, Le ciel s’éteindrait dans nos âmes. Étoiles, étoiles des cieux.
Text Authorship:
- by Anatole le Braz (1859 - 1926), "Nuit d'étoiles", appears in La chanson de la Bretagne, Paris, Éd. H. Caillère, first published 1892
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Researcher for this text: Emily Ezust [Administrator]4. Le chant des nuages  [sung text not yet checked]
Language: French (Français)
Breton, je chante les nuages, Aventuriers du ciel profond, Leur mer est la mer sans rivages : Sans atterrir jamais, ils vont ! Jadis, mes nomades pensées Rêvaient de monter à leur bord, Pour ces divines traversées Qu’on fait peut-être après la mort. À les voir voguer dans l’espace, On dirait qu’indéfiniment C’est l’escadre de Dieu qui passe Tout au large du firmament. Ils ont pour fanaux les étoiles. Le soir descendu, le jour clos, On entend chanter dans leurs voiles De mystérieux matelots... **** Parfois aussi, formes étranges D'un monde ailé qui toujours fuit, Ils semblent un chœur de beaux anges Agenouillés devant la nuit. Ils doivent connaître des psaumes Qui font s’entr’ouvrir à leurs pas Les cités d’en haut, les Royaumes Où nos cœurs aspirent d’en bas. Et, comme un temple de silence, Le ciel s’agrandit dans le soir ; Et la lune au vent se balance Avec des lenteurs d’encensoir. **** Cœurs changeants, épris de voyages, Les Bretons, ce peuple banni, Se sont faits, comme leurs nuages, Les pèlerins de l’infini.
Text Authorship:
- by Anatole le Braz (1859 - 1926), "Le chant des nuages", appears in La chanson de la Bretagne, Paris, Éd. H. Caillère, first published 1892
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Researcher for this text: Emily Ezust [Administrator]5. Le chant d’Ahès  [sung text not yet checked]
Language: French (Français)
Je suis Ahès ! La mer en moi s’est faite femme, Ma chevelure éparse aux quatre vents des cieux Embaume l’univers de son puissant dictame. Le firmament n’est beau que miré dans mes yeux. Mes flancs sont d’or liquide, et le soleil s’y pâme, J’endors en mes bras purs les soirs mystérieux. L’homme à me contempler se sentit naître une âme Et vit de mon sein clair surgir ses premiers dieux. Homme, les dieux sont sourds ; stérile est la prière, Baigne-toi dans Ahès comme en ta fin dernière, Viens ! Je te verserai l’amour. Je sais aimer. Laisse au vent de la nuit voguer ta voile errante, Il n’est que de sentir ses yeux las se fermer Sous le baiser muet de la mer transparente.
Text Authorship:
- by Anatole le Braz (1859 - 1926), "Le chant d’Ahès", appears in La chanson de la Bretagne, Paris, Éd. H. Caillère, first published 1892
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Researcher for this text: Emily Ezust [Administrator]6. La chanson du vent qui vente  [sung text not yet checked]
Language: French (Français)
An avel a zeu deus a bell ; Den na oar piv ê an avel... Le vent vient de loin ; Personne ne sait qui est le vent... Le vent qui vente est à ma porte Qui pleure, comme une âme morte. Il geint : « Ouvrez au nom de Dieu ! Je vois chez vous lueur de feu, Je voudrais me chauffer un peu ! » Alors j'ai dit à la servante ; « Annik, ouvrez au vent qui vente. » Et le vent qui vente est entré, Et, devant l'âtre vénéré, Doucement il a soupiré. Avec des bonds de chien folâtre, La flamme a sursauté dans l'âtre. « Salut ! a dit le foyer clair, (Car le foyer parle en hiver) « Salut au pauvre vent de mer ! » Le vent, assis sur l'escabelle, A répondu de sa voix belle : « Langue du feu, chère aux humains, Lèche les pieds, lèche les mains Du vagabond des grands chemins. » A la claire flamme vivante S'est réchauffé le vent qui vente ; S'est réchauffé le vent errant Qui toujours va courant, courant, Si maigre qu'il est transparent. Il m'a raconté son histoire, Sa misère, son purgatoire. Père ni mère il n'a connu ; Il ne sait où va son pied nu, Ni d'où, nu-pieds, il est venu. Une âme est en lui, qu'il ignore, Une âme innombrable et sonore ; Il la traîne par l'univers ; Elle est la chanson des blés verts Et le rugissement des mers. Il sème les graines fécondes, Il creuse les fosses des ondes, Il chante et hurle tour à tour ; C'est-un aveugle, c'est un sourd Ouvrier de mort et d'amour.
Text Authorship:
- by Anatole le Braz (1859 - 1926), "La chanson du vent qui vente", appears in La chanson de la Bretagne, Paris, Éd. H. Caillère, first published 1892
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Researcher for this text: Emily Ezust [Administrator]7. Sône  [sung text not yet checked]
Language: French (Français)
Dans un coffret de vieux chêne Mon cœur jeune est enfermé. Quand ma mort sera prochaîne, Vous direz à mon aimé ; Vous direz à mon aimé, Quand ma mort sera prochaine, Que mon cœur est enfermé Dans le coffret de vieux chêne. Sur le coffret de vieux chêne Par un artisan famé Vous ferez sculpter la chaîne Qui me lie à mon aimé. Une chaîne en fleurs de mai Qui s’enroule autour du chêne Pour que mon cœur embaumé Sente moins la mort prochaine. L’amour est comme une chaîne Qui vous lie au seul aimé. Dans un coffret de vieux chêne Mon cœur gît inanimé.
Text Authorship:
- by Anatole le Braz (1859 - 1926), "Sône", appears in La chanson de la Bretagne, Paris, Éd. H. Caillère, first published 1892
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