Il est un jour, une heure, où dans le chemin rude, Courbé sous le fardeau des ans multipliés, L'Esprit humain s'arrête, et, pris de lassitude, Se retourne pensif vers les jours oubliés. La vie a fatigué son attente inféconde ; Désabusé du Dieu qui ne doit point venir, Il sent renaître en lui la jeunesse du monde ; Il écoute ta voix, ô sacré Souvenir ! Les astres qu'il aima, d'un rayon pacifique Argentent dans la nuit les bois mystérieux, Et la sainte montagne et la vallée antique Où sous les noirs palmiers dormaient ses premiers Dieux. Il voit la Terre libre et les verdeurs sauvages Flotter comme un encens sur les fleuves sacrés, Et les bleus Océans, chantant sur leurs rivages, Vers l'inconnu divin rouler immesurés. De la hauteur des monts, berceaux des races pures, Au murmure des flots, au bruit des dômes verts, Il écoute grandir, vierge encor de souillures, La jeune Humanité sur le jeune Univers. Bienheureux ! Il croyait la Terre impérissable, Il entendait parler au prochain firmament, Il n'avait point taché sa robe irréprochable ; Dans la beauté du monde il vivait fortement. L'éclair qui fait aimer et qui nous illumine Le brûlait sans faiblir un siècle comme un jour ; Et la foi confiante et la candeur divine Veillaient au sanctuaire où rayonnait l'amour. Pourquoi s'est-il lassé des voluptés connues ? Pourquoi les vains labeurs et l'avenir tenté ? Les vents ont épaissi là-haut les noires nues ; Dans une heure d'orage ils ont tout emporté. Oh ! la tente au désert et sur les monts sublimes, Les grandes visions sous les cèdres pensifs, Et la Liberté vierge et ses cris magnanimes, Et le débordement des transports primitifs ! L'angoisse du désir vainement nous convie : Au livre originel qui lira désormais ? L'homme a perdu le sens des paroles de vie : L'esprit se tait, la lettre est morte pour jamais. Nul n'écartera plus vers les couchants mystiques La pourpre suspendue au devant de l'autel, Et n'entendra passer dans les vents prophétiques Les premiers entretiens de la Terre et du Ciel. Les lumières d'en haut s'en vont diminuées, L'impénétrable Nuit tombe déjà des cieux, L'astre du vieil Ormuzd est mort sous les nuées ; L'Orient s'est couché dans la cendre des Dieux. L'Esprit ne descend plus sur la race choisie ; Il ne consacre plus les Justes et les Forts. Dans le sein desséché de l'immobile Asie Les soleils inféconds brûlent les germes morts. Les Ascètes, assis dans les roseaux du fleuve, Écoutent murmurer le flot tardif et pur. Pleurez, Contemplateurs ! votre sagesse est veuve : Viçnou ne siège plus sur le Lotus d'azur. L'harmonieuse Hellas, vierge aux tresses dorées, À qui l'amour d'un monde a dressé des autels, Gît, muette à jamais, au bord des mers sacrées, Sur les membres divins de ses blancs Immortels. Plus de charbon ardent sur la lèvre-prophète ! Adônaï, les vents ont emporté ta voix ; Et le Nazaréen, pâle et baissant la tête, Pousse un cri de détresse une dernière fois. Figure aux cheveux roux, d'ombre et de paix voilée, Errante au bord des lacs sous ton nimbe de feu, Salut ! l'Humanité, dans ta tombe scellée, Ô jeune Essénien, garde son dernier Dieu ! Et l'Occident barbare est saisi de vertige. Les âmes sans vertu dorment d'un lourd sommeil, Comme des arbrisseaux, viciés dans leur tige, Qui n'ont verdi qu'un jour et n'ont vu qu'un soleil. Et les sages, couchés sous les secrets portiques, Regardent, possédant le calme souhaité, Les époques d'orage et les temps pacifiques Rouler d'un cours égal l'homme à l'Éternité. Mais nous, nous, consumés d'une impossible envie, En proie au mal de croire et d'aimer sans retour, Répondez, jours nouveaux ! nous rendrez-vous la vie ? Dites, ô jours anciens ! nous rendrez-vous l'amour ? Où sont nos lyres d'or, d'hyacinthe fleuries, Et l'hymne aux Dieux heureux et les vierges en choeur, Eleusis et Délos, les jeunes Théories, Et les poèmes saints qui jaillissent du coeur ? Où sont les Dieux promis, les formes idéales, Les grands cultes de pourpre et de gloire vêtus, Et dans les cieux ouvrant ses ailes triomphales La blanche ascension des sereines Vertus ? Les Muses, à pas lents, Mendiantes divines, S'en vont par les cités en proie au rire amer. Ah ! c'est assez saigner sous le bandeau d'épines, Et pousser un sanglot sans fin comme la Mer ! Oui ! le Mal éternel est dans sa plénitude ! L'air du siècle est mauvais aux esprits ulcérés. Salut, Oubli du monde et de la multitude ! Reprends-nous, ô Nature, entre tes bras sacrés ! Dans ta khlamyde d'or, Aube mystérieuse, Éveille un chant d'amour au fond des bois épais ! Déroule encor, Soleil, ta robe glorieuse ! Montagne, ouvre ton sein plein d'arome et de paix ! Soupirs majestueux des ondes apaisées, Murmurez plus profonds en nos coeurs soucieux ! Répandez, ô forêts, vos urnes de rosées ! Ruisselle en nous, silence étincelant des cieux ! Consolez-nous enfin des espérances vaines : La route infructueuse a blessé nos pieds nus. Du sommet des grands caps, loin des rumeurs humaines, Ô vents ! emportez-nous vers les Dieux inconnus ! Mais si rien ne répond dans l'immense étendue, Que le stérile écho de l'éternel Désir, Adieu, déserts, où l'âme ouvre une aile éperdue ! Adieu, songe sublime, impossible à saisir ! [Et]1 toi, divine Mort, où tout rentre et s'efface, Accueille tes enfants dans ton sein étoilé ; Affranchis-nous du temps, du nombre et de l'espace, Et rends-nous le repos que la vie a troublé !
H. Blanc-Lachau sets stanzas 24-29
E. Moret sets stanza 29
1 Moret: "Ô" ; further changes may exist not shown above.
Authorship:
- by Charles-Marie-René Leconte de Lisle (1818 - 1894), "Dies irae", appears in Poèmes antiques [author's text checked 1 time against a primary source]
Musical settings (art songs, Lieder, mélodies, (etc.), choral pieces, and other vocal works set to this text), listed by composer (not necessarily exhaustive):
- by Henri Louis François Blanc-Lachau (d. 1919), "Dies irae", published [1903], stanzas 24-29 [ reciter, piano ], Paris, Éd. Choudens ; setting begins "Oui ! le Mal éternel est dans sa plénitude ! " [sung text not yet checked]
- by Ernest Moret (1871 - 1949), "Dies irae", published 1930, stanza 29 [ high voice and piano ], from Les fleurs du cercueil, no. 2, Paris, Éd. "Au Ménestrel" Heugel [sung text not yet checked]
Available translations, adaptations or excerpts, and transliterations (if applicable):
- CZE Czech (Čeština) (Jaroslav Vrchlický) , "Dies irae", first published 1901
Researcher for this text: Emily Ezust [Administrator]
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Den vzplá i hodina, na dravé dráze svojí kdy schýlen pod tíží let v stálém přibývání, a mdlobou zachvácen duch lidský náhle stojí a k dnům, jichž zapomněl, se vrací v zadumání. Čekáním neplodným znaveno jeho žití, i bohem oklamán, jenž nepřijde víc k němu, on mladost světa zas v svém nitru vzrůstat cítí, ó, svatá vzpomínko! naslouchá hlasu tvému! Ty hvězdy, jež měl rád, paprskem, mír v němž plane, v plášť noci stříbrný tajemné lesy halí, na horu posvátnou i v dálný dol svit kane, kde v černém palmoví kdys bozi jeho spali. On svobodnou zří zem i bujnou zeleň její, jež proudí kadidlem nad posvátných řek pěny i modrá moře též, jak ve svých březích pějí, ve božské neznámo se valí nezměřeny. A s výše strmých hor, kolébek ryzích rodů, při dómu zelených on šumu, nad vod spádem jak panna, posavad jež nezná viny hlodu, on slyší lidstvo růst kol po vesmíru mladém. Tu šťastný myslil si, že nezná země zmaru, on slyšel hovory, jak v blízká nebe spějí, on plně, cele žil ve kráse jejích tvarů a posud bezvadný neposkvrnil háv její. Blesk, kterým láska vzplá i všecko, co v nás zkvetlo, jej žeh’, však bez škody, po věky jak den celý, na prahu svatyně, kde lásky plálo světlo, tam víra bezpečná a božská cudnost bděly. Proč záhy rozkoše, již zná, se člověk spustil? Proč marné práce vše, nač zkoušky budoucnosti? Dech větru ve výši tam černé mraky zhustil, že v bouře hodině vše odnesly v své zlosti. Ó, stany, na poušti, na velebných hor svahu! Ó, velká vidění, pod cedry dumavými! Záchvaty kypící, tam na života prahu! Volnosti pannenská, s výkřiky vznešenými! Nás láká nadarmo teď úzkost naší touhy, číst v knize původní dnes odvyknul si každý, nám ze slov života se ztratil smysl pouhý, duch zmlk’ a řádky knih se odmlčely na vždy. K západům mystickým se závoj nenazvedne, by před oltářem nach rozhrnul přetajemně, ve větrech prorockých víc nikdo nenahlédne v ty první hovory, jež s nebem vedla země. Ta světla ve výši, ta zvolna všecka hasnou, neproniknutelná noc padá pod oblohu, mrak ztajil Ormuzda již pro věk hvězdu jasnou a starý Orient leh’ do popelu bohů. Duch nesestoupí víc na vyvolený národ a neposvětí ty, kdo silní, spravedliví, a slunce neplodné ves mrtvý spálí zárod, nehybná Asie jejž v lůně vyschlém živí. Ve sítí u řeky asketům nelze déle vod slyšet čistý šum a líný; roucho vdovy jich moudrost oblékla, ó, plačte, myslitelé, víc Višnu nesedne na lotos azurový! Hellas, jež souzvuk jest, ta děva zlatokšticí, jíž láska oltáře stavěla v světě celém, u moří posvátných dlí němá, bledolící, nad údy božskými, nad Nesmrtelných tělem. Víc na rtech proroků se uhlí nerozžhaví, již větry odvály, ó, Adóne, tvé hlasy, a bledý Nazarej ve smutném sklonu hlavy křik’ v děsném zoufalství, by umlk’ pro vše časy! Ty s vlasy rusými, ó, stíne, pozdrav tobě! V plášť smíru zahalen jenž bloudíš jezer lemy pod nimbem ohnivým; v zapečetěném hrobě zbyl’s lidstvu, Essenský, bůh slední mezi všemi! Co západ barbarský se zmítá ve závrati a duše bez ctnosti se v těžký spánek halí, jak keře chorobné, jimž nákaza vzrůst hatí, jež kvetly pouze den a sotva zeleň znaly! Co v tajích portiků již věštci dávní leží a v klidu vysněném zří z hrobů v strnulosti, jak časy pokojné, jak bouřné doby běží, jak člověk řítí se vždy stejně ku věčnosti. Leč nás, nás napořád nemožná choutka tráví, jsme stále lupem zla, zda věřit, milovati? Dny nové, řekněte, nám život dáte pravý? Dny dávné, řekněte, lze vám nám lásku dáti? Kde zlaté lyry jsou, kde hyacinty zkvětlé? Kde panen sbory jsou, kde hymny bohům jasným? Kde Délos, Eleusis, kde Theorie světlé a svaté básně kde, jež tryskly z hrudi šťastným? Kde bozi slíbení, kde formy ideálné? Kde kulty purpurem a slávou oblečené? Kde k nebi letící perutě triumfálné? Kde ctností zářný vstup je v nebe otevřené? Dnes, božské žebračky, jdou Musy volným krokem v kraj, v širá města jdou, jich věno smích a hoře. Ach, dosti krve již, zpod trní, jež vře tokem, a dosti vzdechů již, jež rostou v celá moře. Ba v celé plnosti zlo odvěké nás drží! Víc duchům raněným vzduch doby nepodává. Svět, množství pohrobmež ve zapomnění strži, v svůj svatý vem nás klín, Přírodo shovívavá! V své zlaté chlamydě, tajemná probuď, Zoro, zpěv lásky vítězné ve hloubi hustých lesů, háv, Slunce, rozhrň nám, ty otevři nám, horo, svá ňadra, z nichž vlá mír a vůně tvojich tesů! Vy vzdechy velebné vln moře utišených, jen hlouběj’ šeptejte do hrudí plných péče, nám rosu, pralesy, z urn roňtě naplněných a ticho zářných hvězd ať plně do nás teče! Nás v posled ukojte! — Co naděje vzlet žhavý? Neb cesta neplodná nám poranila nohy, s hor štítů strmících, dál z lidských tísní vřavy nás, větry, zaneste kams mezi cizí bohy! Však dálka ohromná, když odpovědi nedá, když ohlas neplodný zní v odvet věčné touze, pak s bohem, pustiny, kam duše křídla zvedá i nemožný ty sne, jejž schvátit, sen byl pouze. Pak, božská Smrti, kde vše mizí bez ohlasu, své děti přijmi ty, v klín kde se hvězdy třpytí a prostoru nás zbav a čísla, zbav nás času a věčný vrať nám klid, jejž zkalilo nám žití.
Confirmed with Leconte de Lisle, Ch. M. R.: Nová řada básní, překlad (translation by) Jaroslav Vrchlický, Praha (Prague): J. Otto, 1901, pages 27-32.
Authorship:
- by Jaroslav Vrchlický (1853 - 1912), "Dies irae", first published 1901 [author's text checked 1 time against a primary source]
Based on:
- a text in French (Français) by Charles-Marie-René Leconte de Lisle (1818 - 1894), "Dies irae", appears in Poèmes antiques
Musical settings (art songs, Lieder, mélodies, (etc.), choral pieces, and other vocal works set to this text), listed by composer (not necessarily exhaustive):
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Researcher for this page: Andrew Schneider [Guest Editor]
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