Mon berceau s'adossait à la bibliothèque, Babel sombre, où roman, science, fabliau, Tout, la cendre latine et la poussière grecque, Se mêlaient. J'étais haut comme un in-folio. Deux voix me parlaient. L'une, insidieuse et ferme, Disait : « La Terre est un gâteau plein de douceur ; Je puis (et ton plaisir serait alors sans terme !) Te faire un appétit d'une égale grosseur. » Et l'autre : « Viens ! oh ! viens voyager dans les rêves, Au delà du possible, au delà du connu ! » Et celle-là chantait comme le vent des grèves, Fantôme vagissant, on ne sait d'où venu, Qui caresse l'oreille et cependant l'effraie. Je te répondis : « Oui ! douce voix ! » C'est d'alors Que date ce qu'on peut, hélas ! nommer ma plaie Et ma fatalité. Derrière les décors De l'existence immense, au plus noir de l'abîme, Je vois distinctement des mondes singuliers, Et, de ma clairvoyance extatique victime, Je traîne des serpents qui mordent mes souliers. Et c'est depuis ce temps que, pareil aux prophètes, J'aime si tendrement le désert et la mer ; Que je ris dans les deuils et pleure dans les fêtes, Et trouve un goût suave au vin le plus amer ; Que je prends très-souvent les faits pour des mensonges, Et que, les yeux au ciel, je tombe dans des trous. Mais la Voix me console et dit : « Garde tes songes ; Les sages n'en ont pas d'aussi beaux que les fous ! »
Confirmed with Charles Baudelaire, Les Épaves, Amsterdam: À l'enseigne du Coq, 1866, in Pièces diverses, pages 119-121. Also confirmed with Charles Baudelaire, Œuvres complètes de Charles Baudelaire, vol. I : Les Fleurs du mal, Paris: Michel Lévy frères, 1868, in Spleen et Idéal, pages 225-226. Punctuation follows first edition.
First published by À l'enseigne du Coq in Les Épaves under Pièces diverses, 1866; also appears under Spleen et Idéal as number 93 in the 1868 edition of Les Fleurs du mal. In the 1868 edition, line 18, "distinctement" was misspelled "distictement".
Authorship:
- by Charles Baudelaire (1821 - 1867), "La Voix", written 1861, appears in Les Fleurs du mal, in 1. Spleen et Idéal, no. 93, appears in Les Épaves, in 4. Pièces diverses, no. 17, Amsterdam, À l'enseigne du Coq, first published 1866 [author's text checked 3 times against a primary source]
Musical settings (art songs, Lieder, mélodies, (etc.), choral pieces, and other vocal works set to this text), listed by composer (not necessarily exhaustive):
- by Jean-Guy Bailly (1925 - 2009), "La voix", 1992 [ medium voice and piano ], from Trois Poèmes de Baudelaire 2, no. 2 [sung text not yet checked]
Available translations, adaptations or excerpts, and transliterations (if applicable):
- CZE Czech (Čeština) (Jaroslav Haasz) , "Hlas"
- HUN Hungarian (Magyar) (Árpád Tóth) , "A Hang"
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This text was added to the website: 2014-03-25
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Měl jsem svou kolébku kdys u bibliotéky, to chmurný Bábel byl, v němž román, fabliau, vše, věda, latinský i popel, i prach s Řeky se mísil. Veliký byl jsem, jak folio. Hlas dvojí promlouval tu ke mně: pevný, lstivý, děl: „Země koláč jest, jenž pln je sladkosti; já mohu (bez konce tvých plesů budou divy!) chut vzbudit u tebe též stejné velkosti.“ A druhý děl: „Ó, pojď! pojď v snění cestovati, za meze možnosti a známých věcí v dál!“ A zpíval tento hlas, jak vítr v písků trati, když, bludný přízrak ten, jenž, kdo ví, kde se vzal, se sluchem laškuje a přec jej hrůzou zchvátí. Já: „Sladký hlase můj,“ děl, „ano!“ Chvílí tou se může počátek mé rány počítati a sudby. Za zdobou těch kulis velikou a jícnem nejtmavším, v nichž nekonečné bytí, duch můj zří patrně vždy světy neznámé, a, oběť vznícená svých jasných zření, cítí, jak vleku hady jen, již hryžou paty mé. A od té doby jest, že jako prorok dávný tak něžně miluju i poušť i moře tiš; že v smutku směji se a pláču v svátek slavný, a vína chutná mně i nejvíc hořká číš; že často pokládám pak za lež skutek pouhý, v dol padnu, když se výš mé zraky zvedají. Však těchu dává mi Hlas: „Podrž si své touhy, tak lepých mudrci jak blázni nemají!“
Authorship:
- by Jaroslav Haasz (1860 - 1939), "Hlas" [author's text not yet checked against a primary source]
Based on:
- a text in French (Français) by Charles Baudelaire (1821 - 1867), "La Voix", written 1861, appears in Les Fleurs du mal, in 1. Spleen et Idéal, no. 93, appears in Les Épaves, in 4. Pièces diverses, no. 17, Amsterdam, À l'enseigne du Coq, first published 1866
Musical settings (art songs, Lieder, mélodies, (etc.), choral pieces, and other vocal works set to this text), listed by composer (not necessarily exhaustive):
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