by Louis Charles Alfred de Musset (1810 - 1857)
Si je vous le disais pourtant, que je...
Language: French (Français)
Si je vous le disais pourtant, que je vous aime, Qui sait, brune aux yeux bleus, ce que vous en diriez ? L'amour, vous le savez, cause une peine extrême ; C'est un mal sans pitié que vous plaignez vous-même ; Peut-être cependant que vous m'en puniriez. Si je vous le disais, que six mois de silence Cachent de longs tourments et des voeux insensés : Ninon, vous êtes fine, et votre insouciance Se plaît, comme une fée, à deviner d'avance ; Vous me répondriez peut-être : Je le sais. Si je vous le disais, qu'une douce folie A fait de moi votre ombre, et m'attache à vos pas : Un petit air de doute et de mélancolie, Vous le savez, Ninon, vous rend bien plus jolie; Peut-être diriez-vous que vous n'y croyez pas. Si je vous le disais, que j'emporte dans l'âme Jusques aux moindres mots de nos propos du soir : Un regard offensé, vous le savez, madame, Change deux yeux d'azur en deux éclairs de flamme ; Vous me défendriez peut-être de vous voir. Si je vous le disais, que chaque nuit je veille, Que chaque jour je pleure et je prie à genoux ; Ninon, quand vous riez, vous savez qu'une abeille Prendrait pour une fleur votre bouche vermeille ; Si je vous le disais, peut-être en ririez-vous. Mais vous n'en saurez rien. Je viens, sans rien en dire, M'asseoir sous votre lampe et causer avec vous ; Votre voix, je l'entends ; votre air, je le respire ; Et vous pouvez douter, deviner et sourire, Vos yeux ne verront pas de quoi m'être moins doux. Je récolte en secret des fleurs mystérieuses : Le soir, derrière vous, j'écoute au piano Chanter sur le clavier vos mains harmonieuses, Et, dans les tourbillons de nos valses joyeuses, Je vous sens, dans mes bras, plier comme un roseau. La nuit, quand de si loin le monde nous sépare, Quand je rentre chez moi pour tirer mes verrous, De mille souvenirs en jaloux je m'empare ; Et là, seul devant Dieu, plein d'une joie avare, J'ouvre, comme un trésor, mon coeur tout plein de vous. J'aime, et je sais répondre avec indifférence ; J'aime, et rien ne le dit ; j'aime, et seul je le sais ; Et mon secret m'est cher, et chère ma souffrance ; Et j'ai fait le serment d'aimer sans espérance, Mais non pas sans bonheur ; je vous vois, c'est assez. Non, je n'étais pas né pour ce bonheur suprême, De mourir dans vos bras et de vivre à vos pieds. Tout me le prouve, hélas ! jusqu'à ma douleur même... Si je vous le disais pourtant, que je vous aime, Qui sait, brune aux yeux bleus, ce que vous en diriez ?
D. Milhaud sets stanzas 9-10
L. Diémer sets stanzas 1-2, 5-6, 9-10
M. Giuliani sets stanzas 1, 7-8
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View text with all available footnotesNote: first appeared in Emmeline, in La Revue des deux mondes, August 1, 1837, and later in Poésies nouvelles (1850), n°20.
Text Authorship:
- by Louis Charles Alfred de Musset (1810 - 1857), "À Ninon", written 1835, appears in Poésies nouvelles, first published 1837 [author's text checked 1 time against a primary source]
Musical settings (art songs, Lieder, mélodies, (etc.), choral pieces, and other vocal works set to this text), listed by composer (not necessarily exhaustive):
- by Louis Bonnet , "Si je vous le disais", published c1880 [ medium voice and piano ], from Douze Mélodies pour chant et piano, 1er volume, no. 9, Éd. E. et A. Girod [sung text not yet checked]
- by Louis Diémer (1843 - 1919), "À Ninon", published 1875, stanzas 1-2,5-6,9-10 [ voice and piano ], from Vingt Mélodies, no. 14, Paris : Henri Heugel [sung text checked 1 time]
- by Émile Durand (1830 - 1903), "Si je vous le disais ?", published [1879], from Trois mélodies, no. 1, Paris, Éd. Théodore Michaëlis [sung text not yet checked]
- by Michel Giuliani (1801 - 1867), "Le Secret du cœur", published 1852, stanzas 1,7-8 [ mezzo-soprano or baritone and piano ], from Album de dix Mélodies romances et duos par M. Giuliani, no. 1, Paris, Éd. Brandus & Cie. [sung text checked 1 time]
- by André Philippe Alfred Régnier de Massa, comte Gronau (1837 - 1913), "À Ninon" [ high voice and piano ], from Recueil de Mélodies, 1er volume, no. 9, Durand, Schoenewerk [sung text not yet checked]
- by Darius Milhaud (1892 - 1974), "J'aime", op. 409 no. 2 (1964), published 1966, stanzas 9-10 [ soprano and piano ], from L'amour chante, no. 2, Bryn Mawr, Theodore Presser and Co. [sung text checked 1 time]
Researcher for this text: Emily Ezust [Administrator]
This text was added to the website between May 1995 and September 2003.
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