Près de la pierre runique, dans la nuit d'été,
C'est là que jouent les ondines ;
L'eau grelotte, la brise chante,
La lune est haut dans le ciel.

On barbote et rit, on ondoie et plonge
Comme des lis qui s'élèvent et s'abaissent,
Les chevelures d'or flottent sur les ondes,
Les membres blancs étincellent.

L'ondin à la barbe de roseau souffle
Dans un trombone de coquillage contourné,
Les nymphes se précipitent dans la ronde,
Elles sont de la meilleure humeur.

Vient alors la plus jeune en pouffant de rire :
» Eh, voyez ce que j'ai trouvé dans les vagues !
Les ossements luisants d'un mort
Qui brillent aussi clair que l'argent.

Mon pied a buté sur le récif de corail
Alors que je m'amusais à plonger,
Il était là dans les branches, je l'en ai sorti ;
Maintenant, dites, que pourrions-nous en faire ? «

La foule contemple la découverte avec curiosité,
Et la reine dit en riant :
» Cette chose en os est jolie et fine,
Nous allons en faire une harpe.

Viens, Barbe-de-roseau, vieux musicien,
Tu t'y connais en ces choses ;
Je t'offre un espadon comme monture
Si tu peux y arriver. «

L'ondin arrive, il prend les ossements,
Il les assemble avec une longue pelote,
Avec les doigts il fabrique les chevilles,
Avec une côte il fait la console.

Il prend à la reine des cheveux d'or
Et les y tend en guise de cordes ;
Écoutez comme durant toute la nuit d'étranges
Sons s'élèvent et planent !

Puis il joue de la harpe crescendo et diminuendo,
Alors les vagues cessent leur murmure,
Le vent retient doucement son souffle
Et s'endort en écoutant.

Les mouettes se posent sur la plage,
De petits poissons rouges montent des profondeurs,
Les airs écoutent, la mer écoute,
Tout alentour est ensorcelé ;

L'ondin chante accompagné à la harpe,
Il ne ressent ni fatigue ni peine ;
Et là-dessus tourne la ronde des nymphes
Jusqu'aux rougeurs du matin.