Chansons de Mer

Song Cycle by Charles Marie Jean Albert Widor (1844 - 1937)

1. La mer [sung text checked 1 time]

La mer énorme se soulève,
Je suis comme un enfant perdu.
O mer! Quand m'emporteras-tu
Vers le pays où vit mon rêve?... 

J'entends crier le goëland, 
Comme lui mon coeur est sauvage; 
Il eut jadis son doux servage, 
D'oiseau caressé, mais tremblant... 

Le vent creuse les lames hautes. 
Je sens passer soudain en moi 
Un peu du frissonant émoi 
De ces lames le long des côtes.... 

Elles et moi, d'après amours 
Nous précipitent vers notre astre, 
Et le meme odieux désastre 
Nous fait rouler bien loin, toujours....

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2. À mi-voix [sung text checked 1 time]

Je me souviens qu'un soir où vous aviez pleuré,
Moi, je suis près de vous plus longtemps demeuré.
C'étiat sur la terrasse, à l'heure des étoiles.
Confiante et pourtant sans soulever les voiles
Qui dérobent aux yeux votre coeur noble et fier,
Vous me parliez tout bas en regardant la mer,
La lune se noyait tremblante, sur les vagues,
D'où s'élevaient des bruits si lointains et si vagues
Qu'on eût dit une plainte échappée à moitié.
Vous me parliez tout bas avec tant d'amitié,
Que, dussé-je viellir bien vieux dans ce vieux monde,
Je n'oublierai jamais l'impression profonde
Que m'a faite l'accord mystérieux et doux
De votre voix avec ce ciel pur comme vous.

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3. Sérénade italienne [sung text checked 1 time]

Partons en barque sur la mer
Pour passer la nuit aux étoiles.
Vois, il souffle juste assez d'air
Pour [gonfler]1 la toile des voiles.

Le vieux pêcheur italien 
Et ses deux fils qui nous conduisent,
Écoutent, mais n'entendent rien
Aux mots que nos bouches se disent.

Sur la mer calme et sombre, vois : 
Nous [pouvons]2 échanger nos âmes,
Et nul ne comprendra nos voix
Que la nuit, le [ciel et les]3 lames.

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Available translations, adaptations or excerpts, and transliterations (if applicable):

  • CZE Czech (Čeština) (Jaroslav Vrchlický) , "Vlašská serenáda", Prague, first published 1893
  • ENG English (Peter Low) , "Italian serenade", copyright © 2000, (re)printed on this website with kind permission

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1 Chausson: "enfler"
2 Widor: "pourrons"
3 Widor: "ciel, les"

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4. Encore un soir qui tombe [sung text checked 1 time]

Encore un soir qui tombe, un soir qui ne m'apporte
Qu'un regret plus navrant de ma jeunesse morte.
Que ne suis-je pareil à ces noirs paysans
Dont je vois les maisons éparses dans les champs,
Et qui, durs travailleurs, ne comptent leurs journées
Que par l'entassement des gerbes moissonnées?
Mais, mois, le grand silence et la clarté du ciel,
La ligne des coteaux boisés, le lent appel
Que l'Angelus du soir jette dans la vallée,
Tout me fait souvenir de ma vie en allée....

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5. La petite couleuvre bleu [sung text checked 1 time]

La petite couleuvre bleue
Du désir me sifflait tout bas:
«O poète, encore une lieue,
Marche vite et ne tremble pas.»

O petite couleuvre bleue
Que tes sifflements m'ont fait mal,
J'ai cheminé plus d'une lieue 
Sans rencontrer mon Idéal. 

Mon Idéal est une vierge 
Qui jamais ne me sourira. 
«Va, frappe à la prochaine auberge,
Qui sait quelle main t'ouvrira?» 

Une vielle avec politesse 
Ouvre la porte doucement: 
«Avez-vous vu, dame l'hôtesse,
Une enfant au rire charmant?»

Elle porte, la jeune vierge, 
Des perles noires au collier.
«Elle a diné là, dans l'auberge,
Avec un jeune cavalier.» 

«Merci, Madame.» «Voici l'heure
Où l'ombre tombe, entrez chez nous.»
«Merci, l'hôtesse, que je meure, 
Si je dors une heure chez vous!» 

Petite couleuvre menteuse,
Pourquoi m'as-tu charmé le coeur? 
Oh! Dis-moi, n'est-tu pas honteuse 
De me siffler ton air moqueur? 

Voici que seul et sans lumière
Je reconnais le vieux chemin 
Qui conduisait au cimetière.
«Marche encore et crois à demain. 

Peut-etre que parmi ces marbres 
Erre ton amie.» On entend
Gémir le vent parmi les arbres
«C'est son soupir, elle t'attend.» 

O petite couleuvre fausse,
Je suis las, et la nuit palit 
Voici l'aube. «Entre dans la fosse, 
Pour sommeiller, c'est un bon lit; 

Tu reveras de cette amie
Que tu porsuivis si longtemps.» 
La terre à mon âme endormie 
Est bien lourde, que faire? 
«Attends»

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6. À l'aube [sung text checked 1 time]

Dans la lumière et dans la bruit
S'éveille la petit village:
Enfants et femmes, sur la plage,
Attendant les pêcheurs de nuit.

La mer semble un ruban de moire, 
Les voiles des bateaux tremblants 
Font comme des légers points blancs 
Sur la profondeur bleue et noire. 

De grands oiseaux passent dans l'air 
Ailes ouvertes, et les voiles 
Parmi les dernières étoiles, 
Brillent dans l'azur du ciel clair.

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7. Ce monde meilleur [sung text checked 1 time]

Ce monde meilleur et tout autre, 
Le Paradis, je n'en veux pas. 
Tout mon souvenir tient au nôtre, 
Toute ma vie est ici-bas. 

La belle enfant que j'ai choisie, 
Ses cheveux, sa bouche et ses yeux, 
Sa jeunesse et sa poésie, 
Je ne les aurai pas aux cieux. 

Si la chair n'est pas immortelle, 
Si les formes doivent périr, 
Je ne reconnaitrai plus celle 
Qui m'a fait aimer et souffrir.

Authorship:

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8. Rosa, la rose [sung text checked 1 time]

Comme les roses du sentier,
La petite Rose est farouche.
Tout son charme est encore entier
Comme les roses du sentier,
Et son cœur est un églantier
Où se pique la main qui touche.
Comme les roses du sentier,
La petite Rose est farouche.

[ ... ]

Authorship:

Confirmed with Perles de la poésie française contemporaine, 2me édition, Sneek, H. Pijttersen T. Fils, 1880, page 413.


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9. Seul dans la nuit [sung text checked 1 time]

Seul dans la nuit et trop loin de tes yeux, 
Je ne sais pas si tu m'aimes, je doute ; 
Et ma pauvre âme en peine plonge toute 
En un gouffre silencieux. 

Oh! Non, c'était un trop sublime songe! 
Tant de bonheur ne fut jamais réel!... 
Pourtant j'ai bu sur ta bouche ce miel; 
Tes yeux n'étaient pas un mensonge, 

Ils se levaient sur moi fous de langeur; 
Ton âme errait sous tes paupières sombres. 
Pourquoi trouvé-je, entre eux et moi, ces ombres,
Entre leurs caresse et mon coeur?

Authorship:

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10. Les nuages [sung text checked 1 time]

Les nuages vont vite, vite, 
Au fond du ciel couleur de fer, 
Et ces faux amis m'ont tout l'air 
De fuir la ville que j'habite. 

Où s'envolent-ils ? Ce n'est pas 
Vers la merveilleuse contrée 
Où ma pensée est demeurée, 
En Orient, là-bas, là-bas. 

En Orient les cieux sont calmes, 
Les senteurs des fleurs d'oranger 
Flottent dans le vent, si léger 
Qu'il agite à peine les palmes.

Et sous le ciel trop doux à voir,
Je ne sais pas de place prête 
Pour un pâle et triste poète 
Ni pour un froid nuage noir. 

Enfuyons-nous par les espaces, 
Chevauchons les vents furieux 
Et partons pour les sombres cieux 
Qui luisent sur la mer des glaces.

Grandioses et désolés 
Les caps sont noyés de ténèbres,
Les flots chantent des mots funèbres :
Écoutons-les, écouton-les ! 

[ ... ]

Mais au printemps la neige en pleurs 
Ruisselle des collines vertes,
Commes des blessures ouvertes 
Ruisselle le sang des douleurs.

[ ... ]

Authorship:

Confirmed with Paul Bourget, La vie inquiète, in which it is titled "Séraphita-Séraphitus", Paris, Alphonse Lemerre, 1875, pages 158-161; also confirmed with Œuvres de Paul Bourget. Poésies 1872-1876. Au bord de la Mer. -- La Vie inquiète. Petits Poèmes., in which it is titled "Fantaisie du Nord", Paris, Alphonse Lemerre, 1875 [sic], pages 119-121.


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11. Douleur précoce [sung text checked 1 time]

Il faut plaindre tous ceux qui n'ont pas eu de mère, 
Car leur espoir est triste et leur joie est amère. 
Même quand une main d'ami s'ouvre pour eux, 
Ils tremblent: on dirait qu'ils ont peur d'etre heureux; 
Et leur âme, avant l'age à l'effort asservie, 
N'est pas apprivoisée aux douceurs de la vie. 

Tel, un oiseau, surpris vivant par l'oiseleur, 
Palpite, le coeur gros de crainte et de douleur, 
Dans la main d'un enfant qui doucement le presse, 
Et le pauvret se meurt d'effroi sous la caresse.

Authorship:

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12. Le ciel d'hiver [sung text checked 1 time]

Le ciel d'hiver, si doux, si triste, si dormant,
Où le soleil errait parmi [des]1 vapeurs blanches,
Était pareil au doux, au profond sentiment
Qui nous rendait heureux mélancoliquement
Par [cette après-midi de rêves]2 sous les branches...

Branches mortes qu'aucun souffle ne remuait,
Branches noires [avec]3 quelque feuille fanée,
-- Ah! que [mon âme s'est à ton âme]4 donnée
Plus tendrement [encor]5 dans ce grand bois muet,
Et dans cette langueur de la mort de l'année !

[ ... ]

Authorship:

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Available translations, adaptations or excerpts, and transliterations (if applicable):

  • CAT Catalan (Català) [singable] (Núria Colomer) , copyright © 2020, (re)printed on this website with kind permission
  • ENG English (John Glenn Paton) , "Sentimental landscape", copyright © 2010, (re)printed on this website with kind permission
  • GER German (Deutsch) (Bertram Kottmann) , "Seelengefilde", copyright © 2010, (re)printed on this website with kind permission
  • HUN Hungarian (Magyar) (Tamás Dániel Csűry) , "Érzelmes tájkép", copyright © 2010, (re)printed on this website with kind permission
  • ITA Italian (Italiano) (Enrico Magnani) , "Paesaggio sentimentale", copyright © 2009, (re)printed on this website with kind permission
  • SPA Spanish (Español) (Mónica Luz Alvarez Jiménez) , copyright © 2012, (re)printed on this website with kind permission

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Confirmed with Œuvres de Paul Bourget: Poésies 1876-1882. Edel. Les Aveux, Paris, Alphonse Lemerre, 1885, pages 137-138.

1 Widor: "les"
2 Debussy: "cet après-midi de baisers"
3 Widor: "portant"
4 Debussy: "ta bouche s'est à ma bouche"
5 Debussy: "encore"

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13. Les yeux et la voix [sung text checked 1 time]

Quand l'amie est là qui nous laisse 
Nous anéantir dans ses yeux, 
Les longs regards silencieux 
Suffisent presque à la tendresse. 

Mais, quand elle est loin, l'on voudrait 
Se rappeler quelque mot tendre, 
Dont l'accent seul eût fait entendre 
Ce qu'elle éprouvait en secret. 

On voudrait qu'elle eût dit: «Je t'aime!»
Qu'elle l'eût répété cent fois ; 
Il nous semble que dans la voix 
Etait l'évidence suprême!....

Et cependant, beaux yeux si doux
Vous que brûle une flamme noire
Et languisante, en qui donc croire,
Si l'on ne croyait pas en vous?

Authorship:

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14. Répos eternel [sung text checked 1 time]

[Lorsque la mort, posant son doigt blanc]1 sur mon front, 
Fera que pour topujours mes yeux se fermeront 
     À la beauté vivante, 
Choisissez-moi, vous tous à qui je serai cher, 
Une tombe au soleil sur le bord de la mer 
     Infinie et mouvante. 

Les jours où prodiguant le rire et les sanglots 
Le vent labourera l'azur sombre des flots, 
J'écouterai gronder leur masse exaspérée, 
Et je me souviendrai des fureurs d'autrefois, 
Lorsque dans tout mon cœur retentissait la voix 
Des [folles]2 passions qui montaient leur marée. 

Et lorsque chanteront les grands flots apaisés, 
J'entendrai résonner des anciens baisers
     La musique lointaine,
-- Pour charmer le répos éternel, c'est assez 
Des trésors de douleur et de joie, amassés, 
     Dans une vie humaine.

Authorship:

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Confirmed with La vie inquiète, Paris, Alphonse Lemerre, 1875, pages 67-68; and with Oeuvres de Paul Bourget: Poésies 1872-1876, Paris, Alphonse Lemerre, 1885, pages 59-60.

1 Bourget, in the 1875 edition: "Oh ! quand la mort, posant ses doigts blancs"
2 "" : "fortes"

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