Il pleut ; les limaçons dormiront sous les feuilles, Et moi je vous chanterai, mon petit ami, Je vous chanterai, à la maison, toute seule … Demain sera dimanche si vous avez dormi. Il y aura des petites bêtes à bon Dieu Au bois de Moal, des pommes dans les fossés ; Y aura des mûres au plafond … Dormez, dormez, Mon ami. — Votre grand-père est auprès du feu, Votre mère est sur le chemin, contre le vent… Et moi. je vous chante la petite chanson… Je la chanterai encore quand vous serez grand, Et puis quand je serai aveugle à la maison, Et que vous sérez parti en bateau, pour les Indes : Chercher des nouveautés pour la petite vieille blanche. Votre mère est rentrée, le feu va s'éteindre, La nuit sera belle et demain dimanche.
La chambre blanche, 10 mélodies sur des poèmes d'H. Bataille
by Gabriel Grovlez (1879 - 1944)
1. Berceuse  [sung text not yet checked]
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- by Henry Bataille (1872 - 1922), "Berceuse", appears in La chambre blanche, appears in Le beau voyage, Paris, Éd. du Mercure de France, first published 1895
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Note: First published in 1895 without a title, but in Le Beau Voyage, Paris, Éd. Charpentier, 1904, this text was titled "Berceuse"
Confirmed with Henry Bataille, Le beau voyage : poésies, Bibliothèque-Charpentier, Eugène Fasquelle, éditeur (Paris), 1904
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2. Berceuse  [sung text not yet checked]
Oiseau bleu, couleur du temps, Me connais-tu ? fais-moi signe : — La nuit nous donne des airs sanglotants, Et la lune te fait blanc comme les cygnes… Oiseau bleu, couleur du temps, Dis, reconnais-tu la servante Qui tous les matins ouvrait La fenêtre et le volet De la vieille tour branlante ?… Où donc est le saule où tu nichais tous les ans, Oiseau bleu, couleur du temps ? Oiseau bleu, couleur du temps. Dis un adieu pour la servante Qui n’ouvrira plus désormais La fenêtre, ni le volet De la vieille tour où tu chantes… Ah ! reviendras-tu tous les ans, Oiseau bleu, couleur du temps ?
Authorship:
- by Henry Bataille (1872 - 1922), "Berceuse", written 1893, appears in La chambre blanche, Paris, Éd. du Mercure de France, first published 1895
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Note: First published in 1895 without a title, but in Le Beau Voyage, Paris, Éd. Charpentier, 1904, this text was titled "Berceuse"
Confirmed with Remy de Gourmont, Le IIme Livre des masques, Société du Mercure de France, 1898 p. 220-230
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3. Chanson  [sung text not yet checked]
Canard blanc, canard gris, bec en l'air, sous la pluie, S'en vont à Nantes par la lande et par là plaine, Et ramiers doux, petits ramiers, couleur de suie, Sous le soleil, filent vers Metz, Metz en Lorraine... S'én vont aussi les beaux navires sans patrie. .. Nous ne boirons pas le vin qu'ils emportent. S'en va la lune, s'en va du ciel à Marie… Mais toi tu restes à ma porte. Battez battants, chantez les cloches, Si tout s'en va, toi tu t'approches… Les beaux navires n'ont pas de nids, Où lèvre heureuse, regards fermés, soucis finis.
Authorship:
- by Henry Bataille (1872 - 1922), "Chanson", written 1893, appears in La chambre blanche, Paris, Éd. du Mercure de France, first published 1895
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Confirmed with Henry Bataille, Le beau voyage : poésies, Bibliothèque-Charpentier, Eugène Fasquelle, éditeur (Paris) 1904, pages 13-14.
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4. Songe  [sung text not yet checked]
J'ai rêvé quelque monde asile D'un tas de petits orphelins, Quelqu'astre infime et bien tranquille, Tout rempli de robes de lin, Des déserts comblés de fleurs blanches, Presque sans ombres et sâns nûit, Rien que des fleurs et pas de branches, Rien que des enfants, pas de bruit... Un soleil dessus doux et triste, Un grand' azur, blond, automnal, Et partout des fleurs de batiste Jusqu'à l'horizon linéal. Les hirondelles étaient blanches, Et le vent soulevait partout Des scintillements d'avalanches, Comme un grand suaire où l'on coud Beaucoup d'âmes de petits anges Eux, par bandes, ils s'en allaient Au travers des chemins étranges, Dans ces neiges qui pullulaient ; Ils étaient tous de même taille, Ils ne riaient jamais, jamais, Ils n'avaient pas de funérailles ; C'était toujours la paix, la paix... Leur robe serrait la poitrine Et s'étoffait sur leurs pieds nus, Calme orphelin, calme orpheline, Les oubliés, les ingénus... Et des anges en demoiselles Leur servaient de bons conducteurs, Comme on en met dans les chapelles Avec des violons chanteurs... Tout rempli de robes de lin J'ai rêvé quelque monde asile D'un tas de petits orphelins.
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- by Henry Bataille (1872 - 1922), "Songe", written 1895, appears in La chambre blanche, Paris, Éd. du Mercure de France, first published 1895
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Confirmed with Henry Bataille, Le beau voyage : poésies, Bibliothèque-Charpentier, Eugène Fasquelle, éditeur (Paris) 1904, pages 21-22.
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5. Les Villages  [sung text not yet checked]
Il y a de grands, soirs où les villages meurent. Après que les pigeons sont rentrés se coucher, Ils meurent, lentement, avec le bruit de l'heure Et le cri bleu des hirondelles, au clocher… Alors, pour les veiller, des lumières s'allument, Vieilles petites lumières de bonnes sœurs, Et des lanternes passent, là-bas, dans la brume… Au loin le chemin gris chemine avec douceur… Les fleurs dans les jardins se sont pelotonnées. Pour écouter mourir leur, village d'antan, Car elles savent que c'est là q’elles sont nées Puis les lumières s'éteignent, cependant Que les vieux murs habituels ont rendu l'âme, Tout doux, tout bonnement, comme de vieilles femmes.
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- by Henry Bataille (1872 - 1922), "Les Villages", written 1891, appears in La chambre blanche, Paris, Éd. du Mercure de France, first published 1895
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Confirmed with Henry Bataille, Le beau voyage : poésies, Bibliothèque-Charpentier, Eugène Fasquelle, éditeur (Paris) 1904, pages 33-34.
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6. La Maison  [sung text not yet checked]
Les psychés ont gardé ton ombre, Aloïda, Où tu penchais ta robe puce ou bien grenat, Au bruit provincial des pendules dorées, Et sur le marbre de la commode tes doigts Depuis autant de temps ont laissé des buées... Par terre le volant de ta sœur Anaïs... Et j'ai pleuré de ces souvenirs, de ces choses, Au milieu d'elles, des globes où sont les roses, Et des parfums du vieux matelas de maïs... La maison paraît plus vide que d'habitude. Personne ne marche dans l'escalier, et puis, Dans ce silence chaud de classes et d'étude, Il y a les odeurs qu'ont les tiroirs moisis... En bas j'entends, sur l'évier, bouger des cruches. Or les volets sont clos, mais ils battent au vent, Comme le cœur de ces vieilles en capeluches Qui remuaient autrefois dans l'appartement... Les volets sont fermés et l'on entend derrière Quelquefois un pigeon qui passe… et c'est aussi Derrière, qu'il y a du soleil plein la terre, Des routes et des champs de blés, des murs roussis, Des mauves dans le creux des gazons, et des feuilles De peupliers qui tombent aux bassins décrus... Je sais cela dans cette ombre que je recueille, Aloïda ! mais vous, vous ne le savez plus... Vous ne le savez plus, vous en étant allées, Que le soleil est clair sur le toit des maisons, Que vos hortensias fanent dans les allées. Mais, après tout, n'avez-vous pas eu bien raison De mourir ?... c'est ainsi que ces globes de fleurs Auraient dû faire... O les doucereuses minutes, Où j'ai bu de tout près, pour rafraîchir mes pleurs, L'eau dormante de ces psychés où vous parûtes.
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- by Henry Bataille (1872 - 1922), "La Maison", written 1893, appears in La chambre blanche, Paris, Éd. du Mercure de France, first published 1895
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Note: First published in 1895 without a title, but in Le Beau Voyage, Paris, Éd. Charpentier, 1904, this text was titled "La maison"
Confirmed with Henry Bataille, Le beau voyage : poésies, Bibliothèque-Charpentier, Eugène Fasquelle, éditeur (Paris) 1904, pages 41-42.
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7. Les Yeux  [sung text not yet checked]
Voyons si ce sont bien tes yeux Ces yeux où mon passé s’oublie, Ces inconnus et simples yeux Qui vont se poser sur ma vie... Encore des regards nouveaux Pour m’apprendre encore à pleurer ! Deux pauvres yeux comme il m'en faut, Deux pauvres yeux que j'aimerai, Pas plus grands que des yeux quelconques, Et plus grands que lu destinée... O nouveaux venus qui venez Vous reposer des routes longues Savez-vous que j'en dois souffrir ? Savez-vous si j'en dois mourir ? Encore des regards à aimer... Enfin ! venez, que l'on vous voie. J'en connais qui se sont fermés Et qui m’apportaient plus de joie... C’étaient ceux de ma mère douce, De mon père et de vieilles gens Sur qui maintenant l’herbe pousse, Et qui n’étaient pas bien méchants... Allons, entrez, je vous le dis, Aprés les autres, dans ma vie ! Entrez, sans remords ni scrupule, Lamentables ou salutaires, Et puissé-je de tant de lumière Me faire un heureux crépuscule...
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- by Henry Bataille (1872 - 1922), "Les Yeux", written 1893, appears in La chambre blanche, Paris, Éd. du Mercure de France, first published 1895
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Note: First published in 1895 without a title, but in Le Beau Voyage, Paris, Éd. Charpentier, 1904, this text was titled "Les yeux"
Confirmed with Henry Bataille, Le beau voyage : poésies, Bibliothèque-Charpentier, Eugène Fasquelle, éditeur (Paris) 1904 p. 59
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8. Promenade  [sung text not yet checked]
Ne bouge pas… la lune a remué sur l'eau… les feuilles mortes n'osent pas s'approcher d'elle… Viens, ne fais pas de bruit… c'est l'heure des roseaux. Nous tremperons nos doigts dans la lune fraîche et bolle, Et nous la troublerons presque en soumant dessus. Elle voudrait peut-être aller à la dérive, Vers les longs fleuves dont elle s'est souvenue, Au pays des romances et des belles captives. Mais elle ne peut pas partir avec les rames Et les oiseaux qui s'en iront demain matin. Se rappellera-t-elle le soir où nous passâmes, Près d'elle, tout près d'elle, en lui tendant les mains? Écoute… oh! l’on défaille dans l'ombre. Un rossignol de nuit est tombé dans les branches. Vois nos lampes là-bas, au fond du ja'rdin sombre… Elles s'éteignent comme se sont couchées, toutes blanches, Les robes cérémonieuses des jets d'eau. C’est l’heure des roseaux. Viens… ne fais pas de bruit…
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- by Henry Bataille (1872 - 1922), "Promenade", written 1894, appears in La chambre blanche, appears in Le beau voyage, Paris, Éd. du Mercure de France, first published 1895
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Note: First published in 1895 without a title, but in Le Beau Voyage, Paris, Éd. Charpentier, 1904, this text was titled "Promenade"
Confirmed with Henry Bataille, Le beau voyage : poésies, Bibliothèque-Charpentier, Eugène Fasquelle, éditeur (Paris), 1904
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9. La Vie  [sung text not yet checked]
Je porte parfois toutes les douleurs humaines, Celles des veuves, celles des malades, celles des orphelins, De ceux qui pleurent et de ceux qui ne disent rien… Je les sens silencieuses en moi : elles vont et viennent, Comme les passants, et mon âme ne leur peut rien dire, Pas plus qu'aux passants dans les rues... Cependant, je les sens qui vivent, marchent, respirent, Et je sais que tout à l'heure elles seront disparues. Ces jours-là je comprends des choses que je ne comprenais pas.. Je comprends pourquoi il y a des voiles de crêpe, Et des yeux rouges derrière, Des gens qui courent, très pâles et très las... Et d’autres qui regardent vaguement par terre… Je comprends la tristesse de pauvres petites choses A des étalages, dans des magasins du soir… Demain je ne verrai plus rien de tout cela, je suppose, Mais je sais qu'aujourd’hui on a pleuré et qu'il fait noir... Je suis comme bien des orphelins et bien des malades... Je voudrais tomber là, dans ce ruisseau du coin, Ce ruisseau de ville, sale, bleu de savonnade, Où des blanchisseuses qui chantaient ont jeté de l'eau, Tomber de douleur et loin de ton baiser, Oh ! si loin ! seul, écrasé De toute la souffrance du monde... Et je regarderais sans penser Le soleil qui monte, qui monte…
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- by Henry Bataille (1872 - 1922), "La Vie", written 1894, appears in La chambre blanche, Paris, Éd. du Mercure de France, first published 1895
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Note: First published in 1895 without a title, but in Le Beau Voyage, Paris, Éd. Charpentier, 1904, this text was titled "La vie"
Confirmed with Henry Bataille, Le beau voyage : poésies, Bibliothèque-Charpentier, Eugène Fasquelle, éditeur (Paris) 1904 pages 83-84.
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10. L'Adieu  [sung text not yet checked]
Mon enfance, adieu mon enfance. — Je vais vivre. Nous nous retrouverons après l’affreux voyage, Quand nous aurons fermé nos âmes et nos livres, Et les blanches années et les belles images… Peut-être que nous n'aurons plus rien à nous dire, Mon enfance !… tu seras la vieille servante, Qui ne sait plus bercer et ne sait plus sourire, Et moi, plein de ton amertume vigilante, J'ensevelirai le mystère des paroles… Adieu. — Nous rouvrirons les portes du village, Et ce sera la nuit de fête qui console… Et la pluie mouillera ces tendres paysages... Les paysans d'alors dormiront dans leurs chambres, Et les jardins auront leur place accoutumée… Ce sera quelque nuit limpide de septembre, Avec la même route unie et parfumée… Et les branches qui font des silences soudains... Les femmes qui traversent une lampe à la main... Les chiens maigres et plats étendus sur le sable... Le bruit dans les massifs de grands rhododendrons... Ces poussières d'amour que nous ramasserons, Et tous nos bons regrets assis à notre table. .. Je vous retrouverai le soir d'une journée ; Les étoiles du champ viendront à la veillée, Et vous me laisserez pleurer, sur vos genoux. ......................................................................................... Nous entendrons le vent s'endormir dans les arbres. Puis je regarderai mes deux mains apaisées, Sous le clair silence du vieil abat-jour vert... Peut-être un souffle triste ouvrira la croisée... On entendra passer les longs chemins de fer... Et la lune ne sera pas encor levée. Pauvre petite vieille enfance retrouvée, Ce sera comme si je n'avais pas souffert !... Pas souffert ? est-ce vrai ? nous n'avons pas pleuré, Pas souffert ? Oh ! répète-le, ma grise amie, Et vienne ce beau soir que j'évoque à mon gré, Où je caresserai tes lèvres endormies... Ce soir-là, ce soir-là, je saurai bien des choses... Je ne te plaindrai plus de n'avoir pas de roses... Je comprendrai la joie du phalène qui meurt... Alors nous éteindrons la lampe avec douceur.
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- by Henry Bataille (1872 - 1922), "L'Adieu", written 1893, appears in La chambre blanche, Paris, Éd. du Mercure de France, first published 1895
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Note: First published in 1895 without a title, but in Le Beau Voyage, Paris, Éd. Charpentier, 1904, this text was titled "L'adieu"
Confirmed with Henry Bataille, Le beau voyage : poésies, Bibliothèque-Charpentier, Eugène Fasquelle, éditeur (Paris) 1904, pages 87-89.
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