La cigale, ayant chanté Tout l'été, Se trouva fort dépourvue Quand la bise fut venue. Pas un seul petit morceau De mouche ou de vermisseau. Elle alla crier famine Chez la Fourmi sa voisine, La priant de lui prêter Quelque grain pour subsister Jusqu'à la saison nouvelle. «Je vous paierai, lui dit-elle, Avant l'août, foi d'animal, Intérêt et principal.» La Fourmi n'est pas prêteuse; C'est là son moindre défaut. «Que faisiez-vous au temps chaud? Dit-elle à cette emprunteuse. -- Nuit et jour à tout venant Je chantais, ne vous déplaise. -- Vous chantiez? j'en suis fort aise. Et bien! dansez maintenant.»
8 Fables de La Fontaine
by Guy Miaille (b. 1930)
1. La Cigale et la Fourmi  [sung text not yet checked]
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- by Jean de La Fontaine (1621 - 1695), "La cigale et la fourmi", written 1668, appears in Fables
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- ENG English (Emily Ezust) , "The grasshopper and the ant", copyright © 2016
See also La cigale vengée.
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2. Le Corbeau et le Renard  [sung text not yet checked]
Maître Corbeau, sur un arbre perché, Tenait en son bec un fromage. Maître Renard, par l'odeur alléché, Lui tint à peu près ce langage: Hé! Bonjour, Monsieur du Corbeau. Que vous êtes joli! Que vous me semblez beau! Sans mentir, si votre ramage Se rapporte à votre plumage, Vous êtes le phénix des hôtes de ces bois. A ces mots le corbeau ne se sent pas de joie; Et, pour montrer sa belle voix, Il ouvre un large bec, laisse tombe sa proie. Le renard s'en saisit, et dit: Mon bon monsieur, Apprenez que tout flatteur Vit aux dépens de celui qui l'écoute: Cette leçon vaut bien un fromage, sans doute. Le corbeau, honteux et confus, Jura, mais un peu tard, qu'on ne l'y prendrait plus.
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- by Jean de La Fontaine (1621 - 1695), "Le corbeau et le renard", written 1668, appears in Fables
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- ENG English (David Jonathan Justman) , "The Raven and the Fox", copyright ©, (re)printed on this website with kind permission
See also Le renard et le corbeau.
Researcher for this page: Geoffrey Wieting
3. La Grenouille qui veut se faire aussi grosse que le Bœuf  [sung text not yet checked]
Une Grenouille vit un Bœuf Qui lui sembla de belle taille. Elle, qui n'était pas grosse en tout comme un œuf, Envieuse, s'étend, et s'enfle, et se travaille, Pour égaler l'animal en grosseur, Disant: "Regardez bien, ma sœur ; Est-ce assez? dites-moi ; n'y suis-je point encore ? - Nenni. - M'y voici donc? - Point du tout. - M'y voilà ? - Vous n'en approchez point." La chétive pécore S'enfla si bien qu'elle creva. Le monde est plein de gens qui ne sont pas plus sages : Tout bourgeois veut bâtir comme les grands seigneurs, Tout petit prince a des ambassadeurs, Tout marquis veut avoir des pages.
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- by Jean de La Fontaine (1621 - 1695), "La Grenouille qui veut se faire aussi grosse que le Bœuf", written 1668, appears in Fables
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- ENG English (Peter Low) , "The frog who wanted to be as big as an ox", copyright © 2022, (re)printed on this website with kind permission
4. Le Loup et l'Agneau  [sung text not yet checked]
La raison du plus fort est toujours la meilleure : Nous l'allons montrer tout à l'heure. Un agneau se désaltérait Dans le courant d'une onde pure. Un loup survint à jeun, qui cherchait aventure, Et que la faim en ces lieux attirait. Qui te rend si hardi de troubler mon breuvage ? Dit cet animal plein de rage : Tu seras châtié de ta témérité. Sire, répond l'agneau, que Votre Majesté Ne se mette pas en colère ; Mais plutôt qu'elle considère Que je me vas désaltérant Dans le courant, Plus de vingt pas au-dessous d'elle ; Et que, par conséquent, en aucune façon Je ne puis troubler sa boisson. Tu la troubles ! reprit cette bête cruelle ; Et je sais que de moi tu médis l'an passé. Comment l'aurais-je fait, si je n'étais pas né ? Reprit l'agneau : je tette encore ma mère. -- Si ce n'est toi, c'est donc ton frère. -- Je n'en ai point. -- C'est donc quelqu'un des tiens ; Car vous ne m'épargnez guère, Vous, vos bergers et vos chiens. On me l'a dit : il faut que je me venge. Là-dessus, au fond des forêts Le loup l'emporte, et puis le mange, Sans autre forme de procès.
Text Authorship:
- by Jean de La Fontaine (1621 - 1695), "Le loup et l'agneau", written 1668, appears in Fables
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- ENG English (David Jonathan Justman) , "The wolf and the lamb", copyright ©, (re)printed on this website with kind permission
5. Le Laboureur et ses Enfants  [sung text not yet checked]
Travaillez, prenez de la peine : C'est le fonds qui manque le moins. Un riche laboureur, sentant sa mort prochaine, Fit venir ses enfants, leur parla sans témoins. Gardez-vous, leur dit-il, de vendre l'héritage Que nous ont laissé nos parents : Un trésor est caché dedans. Je ne sais pas l'endroit ; mais un peu de courage Vous le fera trouver : vous en viendrez à bout. Remuez votre champ dès qu'on aura fait l'oût[1] : Creusez, fouillez, bêchez ; ne laissez nulle place Où la main ne passe et repasse. Le père mort, les fils vous retournent le champ, De çà, de là, partout ; si bien qu'au bout de l'an Il en rapporta davantage. D'argent, point de caché. Mais le père fut sage De leur montrer, avant sa mort, Que le travail est un trésor.
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- by Jean de La Fontaine (1621 - 1695), "Le laboureur et ses enfants", written 1668, appears in Fables
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Researcher for this text: Emily Ezust [Administrator]6. La Poule aux œufs d'or  [sung text not yet checked]
L'avarice perd tout en voulant tout gagner. Je ne veux, pour le témoigner, Que celui dont la Poule, à ce que dit la Fable, Pondait tous les jours un oeuf d'or. Il crut que dans son corps elle avait un trésor. Il la tua, l'ouvrit, et la trouva semblable A celles dont les oeufs ne lui rapportaient rien, S'étant lui-même ôté le plus beau de son bien. Belle leçon pour les gens chiches : Pendant ces derniers temps, combien en a-t-on vus Qui du soir au matin sont pauvres devenus Pour vouloir trop tôt être riches ?
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- by Jean de La Fontaine (1621 - 1695), "La Poule aux oeufs d'or"
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Researcher for this text: Emily Ezust [Administrator]7. Le Lièvre et la Tortue  [sung text not yet checked]
Rien ne sert de courir ; il faut partir à point. Le Lièvre et la Tortue en sont un témoignage. Gageons, dit celle-ci, que vous n'atteindrez point Sitôt que moi ce but. - Sitôt ? Etes-vous sage ? Repartit l'animal léger. Ma commère, il vous faut purger Avec quatre grains d'ellébore. - Sage ou non, je parie encore. Ainsi fut fait : et de tous deux On mit près du but les enjeux : Savoir quoi, ce n'est pas l'affaire, Ni de quel juge l'on convint. Notre Lièvre n'avait que quatre pas à faire ; J'entends de ceux qu'il fait lorsque prêt d'être atteint Il s'éloigne des chiens, les renvoie aux Calendes, Et leur fait arpenter les landes. Ayant, dis-je, du temps de reste pour brouter, Pour dormir, et pour écouter D'où vient le vent, il laisse la Tortue Aller son train de Sénateur. Elle part, elle s'évertue ; Elle se hâte avec lenteur. Lui cependant méprise une telle victoire, Tient la gageure à peu de gloire, Croit qu'il y va de son honneur De partir tard. Il broute, il se repose, Il s'amuse à toute autre chose Qu'à la gageure. A la fin quand il vit Que l'autre touchait presque au bout de la carrière, Il partit comme un trait ; mais les élans qu'il fit Furent vains : la Tortue arriva la première. Eh bien ! lui cria-t-elle, avais-je pas raison ? De quoi vous sert votre vitesse ? Moi, l'emporter ! et que serait-ce Si vous portiez une maison ?
Text Authorship:
- by Jean de La Fontaine (1621 - 1695), "Le lièvre et la tortue", written 1671, appears in Fables
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8. La Laitière et le Pot au lait  [sung text not yet checked]
Perrette sur sa tête ayant un Pot au lait Bien posé sur un coussinet, Prétendait arriver sans encombre à la ville. Légère et court vêtue elle allait à grands pas; Ayant mis ce jour-là, pour être plus agile, Cotillon simple, et souliers plats. Notre laitière ainsi troussée Comptait déjà dans sa pensée Tout le prix de son lait, en employait l'argent, Achetait un cent d'oeufs, faisait triple couvée; La chose allait à bien par son soin diligent. Il m'est, disait-elle, facile, D'élever des poulets autour de ma maison: Le Renard sera bien habile, S'il ne m'en laisse assez pour avoir un cochon. Le porc à s'engraisser coûtera peu de son; Il était quand je l'eus de grosseur raisonnable: J'aurai le revendant de l'argent bel et bon. Et qui m'empêchera de mettre en notre étable, Vu le prix dont il est, une vache et son veau, Que je verrai sauter au milieu du troupeau? Perrette là-dessus saute aussi, transportée. Le lait tombe; adieu veau, vache, cochon, couvée; La dame de ces biens, quittant d'un oeil marri Sa fortune ainsi répandue, Va s'excuser à son mari En grand danger d'être battue. Le récit en farce en fut fait; On l'appela le Pot au lait. Quel esprit ne bat la campagne? Qui ne fait châteaux en Espagne? Picrochole, Pyrrhus, la Laitière, enfin tous, Autant les sages que les fous? Chacun songe en veillant, il n'est rien de plus doux: Une flatteuse erreur emporte alors nos âmes: Tout le bien du monde est à nous, Tous les honneurs, toutes les femmes. Quand je suis seul, je fais au plus brave un défi; Je m'écarte, je vais détrôner le Sophi; On m'élit roi, mon peuple m'aime; Les diadèmes vont sur ma tête pleuvant: Quelque accident fait-il que je rentre en moi-même; Je suis gros Jean comme devant.
Text Authorship:
- by Jean de La Fontaine (1621 - 1695)
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