Six monologues extraits de « Jedermann »

Est-ce que le banquet est terminé
Et est-ce que tous ont quitté ma salle ?
Ne reste-t-il aucune aide paour moi,
Suis-je donc un homme perdu ?
Et seul dans le monde,
Est-ce déjà mon destin,
Il m'a déjà rendu
Tout nu et sans force,
Comme si je gisais déjà dans ma tombe,
Bien que mon sang soit encore tiède,
Et que mes gens m'obéissent encore,
Et que mes maisons et mes trésors soient miens,
Debout ! Faites sonner le tocsin !
Valets, ne vous prélassez pas dans la maison,
Venez tous vers moi !

(Certains jaillissent et s'enfuient)
Je dois vite faire un voyage,
Et à pied et sans voiture,
Tous mes valets viendront avec moi,
Et mes gros coffres remplis d'argent,
Ils les porteront.
Le voyage sera difficile comme une expédition militaire,
Et j'aurai vraiment besoin de mes trésors.

Ah, Dieu, comme je frémis d'horreur devant la mort,
La sueur de la peur me submerge de détresse ;
Peut-elle tuer l'âme dans notre corps ?
Que m'est-il arrivé soudain ?

Pourtant dans les heures difficiles j'ai toujours
Pu trouver du réconfort,
Je n'ai jamais été complètement abandonné,
Comme un pauvre fou lamentable.

Un refuge a toujours pu être trouvé
Vers où me tourner avec énergie.
Maintenant mes forces sont parties
Et mon esprit est bouleversé.

Je peux à peine me souvenir
Qui je suis : Jedermann,
Le riche Jedermann de toujours.

C'est ma main, c'est mon manteau
Et là devant moi se tient
Mon or, c'est mon trésor,
Grâce auquel j'ai toujours le pouvoir
De soumettre tout à mon plaisir.

Maintenant cela va bien quand je le vois
À portée de main tout près de moi.
Si je peux rester près de lui,
J'échapperai à l'effroi et à l'angoisse.

Mais, hélas, je dois m'en aller,
Cela me revient à l'esprit.
Le messager était ici, la nouvelle a été délivrée.
Maintenant il est temps d'y aller.

(Il se jette sur sa poitrine)
Pas sans toi, tu dois venir avec moi,
Je ne te laisserai pas derrière moi,
Tu dois maintenant aller dans une autre maison,
Aussi debout et allons-y !

C'était comme si quelqu'un avait appelé,
La voix était faible,
Et pourtant tout à fait claire,
Dieu fais que ce ne soit pas ma mère.

C'est une vieille femme frêle,
Puisse cette vue l'épargner.
Oh, aie pitié de moi,
Que ce ne soit pas ma mère !

Ainsi je voudrais être complètement détruit
Si de tout mon être
Pas une fibre ne criait maintenant
Son repentir profond et sa souffrance sauvage.
Arrière ! Ce n'est pas possible !
Encore un fois !
Et ne revenez pas encore !
Effroi et torture !
Ici on ne vit pas une deuxième fois !
Maintenant la poitrine ouverte sait
Comme elle ne l'a jamais su avant
Ce que ces mots veulent dire :
Couche-toi ici et meurs, c'est ton heure !

Oui ! Je crois : Il a fait ces choses :
La colère du Père a été apaisée,
Il a apporté à l'humanité le salut éternel
Et il est mort pour cela sur la croix.

Pourtant je sais que cela ne profitera
Qu'à celui qui est saint et bon :
À travers ses bonnes actions et sa piété juste
Il s'achète une vie éternelle.

Regardez, ainsi sont mes actions :
J'ai une montagne de péchés
Tellement lourde pour moi,
Que Dieu ne peut m'accorder sa grâce
Car il est le plus juste.

Ô Dieu éternel ! Ô visage divin !
Ô chemin de justice, ô lumière céleste !
Ici je pleure vers toi à ma dernière heure,
Une lamentation sort de ma bouche.

Ô mon Rédempteur, demande au Créateur
Qu'il soit miséricordieux pour moi près de la fin,
Quand l'ennemi infernal approche,
Et que la mort serre cruellement ma gorge,
Qu'il conduise alors mon âme.

Et, mon Sauveur, fais par ton intercession
Que j'aille à sa droite,
Pour marcher dans sa gloire avec lui.

Que tu entendes ma prière,
Car, par amour, tu es mort sur la croix
Et tu as racheté nos âmes.