Bon chevalier masqué qui chevauche en silence, Le Malheur a percé mon vieux cœur de sa lance. Le sang de mon vieux cœur n'a fait qu'un jet vermeil, Puis s'est évaporé sur les fleurs, au soleil. L'ombre éteignit mes yeux, un cri vint à ma bouche Et mon vieux cœur est mort dans un frisson farouche. Alors le chevalier Malheur s'est [rapproché]1, Il a mis pied à terre et sa main m'a touché. Son doigt ganté de fer entra dans ma blessure Tandis qu'il attestait sa loi d'une voix dure. Et voici qu'au contact glacé du doigt de fer Un cœur me renaissait, tout un cœur pur et fier Et voici que, fervent d'une candeur divine, Tout un cœur jeune et bon battit dans ma poitrine ! Or, je restais tremblant, ivre, incrédule un peu, Comme un homme qui voit des visions de Dieu. Mais le bon chevalier, remonté sur sa bête, En s'éloignant, me fit un signe de la tête Et me cria (j'entends encore cette voix) : « Au moins, prudence ! Car c'est bon pour une fois. »
Sagesse
Song Cycle by Pierre Hermant (1869 - 1928)
1. Bon chevalier masqué qui chevauche en silence  [sung text not yet checked]
Text Authorship:
- by Paul Verlaine (1844 - 1896), no title, appears in Sagesse, in Sagesse I, no. 1, first published 1880
See other settings of this text.
Available translations, adaptations or excerpts, and transliterations (if applicable):
- CAT Catalan (Català) (Salvador Pila) , copyright © 2016, (re)printed on this website with kind permission
- ENG English (Peter Low) , "A good masked Horseman", copyright © 2017, (re)printed on this website with kind permission
- GER German (Deutsch) (Bertram Kottmann) , copyright © 2017, (re)printed on this website with kind permission
- GER German (Deutsch) (Stefan George) , no title, appears in Zeitgenössische Dichter, in Frankreich, in Paul Verlaine, in Aus: Weisheit, no. 1
1 Chausson: "approché"
Researcher for this text: Emily Ezust [Administrator]
2. Beauté des femmes, leur faiblesse, et ces mains pâles  [sung text not yet checked]
Beauté des femmes, leur faiblesse, et ces mains pâles Qui font souvent le bien et peuvent tout le mal. Et ces yeux, où plus rien ne reste d'animal Que juste assez pour dire : « assez » aux fureurs mâles Et toujours, maternelle endormeuse des râles, Même quand elle ment, cette voix ! Matinal Appel, ou chant bien doux à vêpre, ou frais signal, Ou beau sanglot qui va mourir au pli des châles ... Hommes durs ! Vie atroce et laide d'ici-bas ! Ah ! que du moins, loin des baisers et des combats, Quelque chose demeure un peu sur la montagne, Quelque chose du cœur enfantin et subtil, Bonté, respect ! Car qu'est-ce qui nous accompagne, Et vraiment, quand la mort viendra, que reste-t-il ?
Text Authorship:
- by Paul Verlaine (1844 - 1896), no title, appears in Sagesse, in Sagesse I, no. 5
Go to the general single-text view
Available translations, adaptations or excerpts, and transliterations (if applicable):
- ENG English (Qi Feng Wu) , copyright © 2023, (re)printed on this website with kind permission
3. Les faux beaux jours ont lui tout le jour, ma pauvre âme  [sung text not yet checked]
Les faux beaux jours ont lui tout le jour, ma pauvre âme, Et les voici vibrer au cuivre du couchant. Ferme les yeux, pauvre âme, et rentre sur-le-champ : Une tentation des pires. Fuis l'infâme. Ils ont lui tout le jour en longs grêlons de flammes, Battant toute vendange aux collines, couchant Toute moisson de la vallée, et ravageant Le ciel tout bleu, le ciel chanteur qui réclame. Ô pâlis, et va-t'en, lente et joignant les mains. Si ces hivers allaient manger nos beaux demains ? Si la vieille folie était encore en route ? Ces souvenirs va-t-il falloir les retuer ? Un assaut furieux, le suprême sans doute ! Ô, va prier contre l'orage, va prier.
Text Authorship:
- by Paul Verlaine (1844 - 1896), no title, appears in Sagesse, in Sagesse I, no. 7, first published 1880
See other settings of this text.
Available translations, adaptations or excerpts, and transliterations (if applicable):
- ENG English (Corinne Orde) , "The false fine days", copyright © 2008, (re)printed on this website with kind permission
4. Écoutez la chanson bien douce  [sung text not yet checked]
Écoutez la chanson bien douce Qui ne pleure que pour vous plaire, Elle est discrète, elle est légère : Un frisson d'eau sur de la mousse ! La voix vous fut connue (et chère ?) Mais à présent elle est voilée Comme une veuve désolée, Pourtant comme elle encore fière, Et dans les longs plis de son voile, Qui palpite aux brises d'automne. Cache et montre au cœur qui s'étonne La vérité comme une étoile. Elle dit, la voix reconnue, Que la bonté c'est notre vie, Que de la haine et de l'envie Rien ne reste, la mort venue. Elle parle aussi de la gloire D'être simple sans plus attendre, Et de noces d'or et du tendre Bonheur d'une paix sans victoire. Accueillez la voix qui persiste Dans son naïf épithalame. Allez, rien n'est meilleur à l'âme Que de faire une âme moins triste ! Elle est en peine et de passage, L'âme qui souffre sans colère, Et comme sa morale est claire !... Écoutez la chanson bien sage.
Text Authorship:
- by Paul Verlaine (1844 - 1896), no title, appears in Sagesse, in Sagesse I, no. 16, first published 1880
See other settings of this text.
Available translations, adaptations or excerpts, and transliterations (if applicable):
- CAT Catalan (Català) (Salvador Pila) , copyright © 2016, (re)printed on this website with kind permission
- ENG English (Peter Low) , copyright © 2021, (re)printed on this website with kind permission
- POL Polish (Polski) (Bronisława Ostrowska) , "Posłuchajcie piosenki", Kraków, J. Mortkowicz, first published 1911
5. Les chères mains qui furent miennes  [sung text not yet checked]
Les chères mains qui furent miennes, Toutes petites, toutes belles, Après ces méprises mortelles Et toutes ces choses païennes, Après les rades et les grèves, Et les pays et les provinces, Royales mieux qu'au temps des princes, Les chères mains m'ouvrent les rêves. Mains en songe, mains sur mon âme, Sais-je, moi, ce que vous daignâtes, Parmi ces rumeurs scélérates, Dire à cette âme qui se pâme ? Ment-elle, ma vision chaste D'affinité spirituelle, De complicité maternelle, D'affection étroite et vaste ? Remords si cher, peine très bonne, Rêves bénis, mains consacrées, Ô ces mains, ces mains vénérées, Faites le geste qui pardonne !
Text Authorship:
- by Paul Verlaine (1844 - 1896), no title, appears in Sagesse, in Sagesse I, no. 17
See other settings of this text.
Researcher for this text: Emily Ezust [Administrator]6. Va ton chemin sans plus t'inquiéter !  [sung text not yet checked]
Va ton chemin sans plus t'inquiéter ! La route est droite et tu n'as qu'à monter, Portant d'ailleurs le seul trésor qui vaille, Et l'arme unique au cas d'une bataille, La pauvreté d'esprit et Dieu pour toi. Surtout il faut garder toute espérance. Qu'importe un peu de nuit et de souffrance ? La route est bonne et la mort est au bout. Oui, garde toute espérance surtout. La mort là-bas te dresse un lit de joie. Et fais-toi doux de toute la douceur. La vie est laide, encore c'est ta sœur. Simple, gravis la côte et même chante, Pour écarter la prudence méchante Dont la voix basse est pour tenter ta foi. Simple comme un enfant, gravis la côte, Humble comme un pécheur qui hait la faute, Chante, et même sois gai, pour défier L'ennui que l'ennemi peut t'envoyer Afin que tu t'endormes sur la voie. Ris du vieux piège et du vieux séducteur, Puisque la Paix est là, sur la hauteur, Qui luit parmi des fanfares de gloire. Monte, ravi, dans la nuit blanche et noire. Déjà l'Ange Gardien étend sur toi Joyeusement des ailes de victoire.
Text Authorship:
- by Paul Verlaine (1844 - 1896), no title, appears in Sagesse, in Sagesse I, no. 21
See other settings of this text.
Researcher for this text: Emily Ezust [Administrator]7. Ô mon Dieu, vous m'avez blessé d'amour  [sung text not yet checked]
Ô mon Dieu, vous m'avez blessé d'amour Et la blessure est encore vibrante, Ô mon Dieu, vous m'avez blessé d'amour. Ô mon Dieu, votre crainte m'a frappé Et la brûlure est encor là qui tonne, Ô mon Dieu, votre crainte m'a frappé. Ô mon Dieu, j'ai connu que tout est vil Et votre gloire en moi s'est installée, Ô mon Dieu, j'ai connu que tout est vil. Noyez mon âme aux flots de votre Vin, Fondez ma vie au Pain de votre table, Noyez mon âme aux flots de votre Vin. Voici mon sang que je n'ai pas versé, Voici ma chair indigne de souffrance, Voici mon sang que je n'ai pas versé. Voici mon front qui n'a pu que rougir, Pour l'escabeau de vos pieds adorables, Voici mon front qui n'a pu que rougir. Voici mes mains qui n'ont pas travaillé, Pour les charbons ardents et l'encens rare, Voici mes mains qui n'ont pas travaillé. Voici mon cœur qui n'a battu qu'en vain, Pour palpiter aux ronces du Calvaire, Voici mon cœur qui n'a battu qu'en vain. Voici mes pieds, frivoles voyageurs, Pour accourir au cri de votre grâce, Voici mes pieds, frivoles voyageurs. Voici ma voix, bruit maussade et menteur, Pour les reproches de la Pénitence, Voici ma voix, bruit maussade et menteur. Voici mes yeux, luminaires d'erreur, Pour être éteints aux pleurs de la prière, Voici mes yeux, luminaires d'erreur. Hélas ! Vous, Dieu d'offrande et de pardon, Quel est le puits de mon ingratitude, Hélas ! Vous, Dieu d'offrande et de pardon, Dieu de terreur et Dieu de sainteté, Hélas ! ce noir abîme de mon crime, Dieu de terreur et Dieu de sainteté, Vous, Dieu de paix, de joie et de bonheur, Toutes mes peurs, toutes mes ignorances, Vous, Dieu de paix, de joie et de bonheur, Vous connaissez tout cela, tout cela, Et que je suis plus pauvre que personne, Vous connaissez tout cela, tout cela, Mais ce que j'ai, mon Dieu, je vous le donne.
Text Authorship:
- by Paul Verlaine (1844 - 1896), no title, appears in Sagesse, in Sagesse II, no. 1
See other settings of this text.
Available translations, adaptations or excerpts, and transliterations (if applicable):
- CZE Czech (Čeština) (Jaroslav Vrchlický) , "Terciny"
- ENG English (Laura Prichard) (Qi Feng Wu) , copyright © 2023, (re)printed on this website with kind permission
8. Je ne veux plus aimer que ma mère Marie  [sung text not yet checked]
Je ne veux plus aimer que ma mère Marie. Tous les autres amours sont de commandement. Nécessaires qu'ils sont, ma mère seulement Pourra les allumer aux coeurs qui l'ont chérie. C'est pour Elle qu'il faut chérir mes ennemis, C'est par Elle que j'ai voué ce sacrifice, Et la douceur de coeur et le zèle au service, Comme je la priais, Elle les a permis ... C'est par Elle que j'ai voulu de ces chagrins, C'est pour Elle que j'ai mon coeur dans les Cinq Plaies, Et tous ces bons efforts vers les croix et les claies, Comme je l'invoquais, Elle en ceignit mes reins. Je ne veux plus penser qu'à ma mère Marie, Siège, de la Sagesse et source des pardons, Mère de France aussi, de qui nous attendons Inébranlablement l'honneur de la patrie. Marie Immaculée, amour essentiel, Logique de la foi cordiale et vivace, En vous aimant qu'est-il de bon que je ne fasse, En vous aimant du seul amour, Porte du ciel ?
Text Authorship:
- by Paul Verlaine (1844 - 1896), no title, appears in Sagesse, in Sagesse II, no. 2, first published 1880
See other settings of this text.
Researcher for this text: Emily Ezust [Administrator]9. L'espoir luit comme un brin de paille dans l'étable  [sung text not yet checked]
L'espoir luit comme un brin de paille dans l'étable. Que crains-tu de la guêpe ivre de son vol fou ? Vois, le soleil toujours poudroie à quelque trou. Que ne t'endormais-tu, le coude sur la table? Pauvre âme pâle, au moins cette eau du puits glacé, Bois-la. Puis dors après. Allons, tu vois, je reste, Et je dorloterai les rêves de ta sieste, Et tu chantonneras comme un enfant bercé. Midi sonne. De grâce, éloignez-vous, madame. Il dort. C'est étonnant comme les pas de femme Résonnent au cerveau des pauvres malheureux. Midi sonne. J'ai fait arroser dans la chambre. Va, dors! L'espoir luit comme un caillou dans un creux. Ah ! quand refleuriront les roses de septembre !
Text Authorship:
- by Paul Verlaine (1844 - 1896), no title, appears in Sagesse, in Sagesse III, no. 3, first published 1880
See other settings of this text.
Available translations, adaptations or excerpts, and transliterations (if applicable):
- ENG English (Peter Low) , copyright © 2022, (re)printed on this website with kind permission
10. Le son du cor s'afflige vers les bois  [sung text not yet checked]
Le son du cor s'afflige vers les bois, D'une douleur on veut croire orpheline Qui vient mourir au bas de la colline, Parmi la [bise]1 errant en courts abois. L'âme du loup pleure dans cette voix, Qui monte avec le soleil, qui décline D'une agonie on veut croire câline, Et qui ravit et qui navre à la fois. Pour faire mieux cette plainte assoupie, La neige tombe à longs traits de charpie A travers le couchant sanguinolent, Et l'air a l'air d'être un soupir d'automne, Tant il fait doux par ce soir monotone, Où se dorlote un paysage lent.
Text Authorship:
- by Paul Verlaine (1844 - 1896), no title, appears in Sagesse, in Sagesse III, no. 9, first published 1880
See other settings of this text.
Available translations, adaptations or excerpts, and transliterations (if applicable):
- CZE Czech (Čeština) (Jaroslav Vrchlický) , "Sonet"
- ENG English (Peter Low) , "The sound of the horn is wailing near the woods", copyright © 2000, (re)printed on this website with kind permission
- ENG English (Corinne Orde) , "The sound of the horn", copyright © 2008, (re)printed on this website with kind permission
- GER German (Deutsch) ( Wolf von Kalckreuth, Graf)
1 sometimes "brise" (breeze)
Researcher for this text: Emily Ezust [Administrator]
11. L'échelonnement des haies  [sung text not yet checked]
L'échelonnement des haies Moutonne à l'infini, mer Claire dans le brouillard clair, Qui [sent]1 bon les jeunes baies. Des arbres et des moulins Sont légers sur le vert tendre, Où vient s'ébattre et s'étendre L'agilité des poulains. Dans ce vague d'un Dimanche, Voici se jouer aussi De grandes brebis, Aussi douces que leur laine blanche. Tout à l'heure déferlait L'onde roulée en volutes, De cloches comme des flûtes Dans le ciel comme du lait.
Text Authorship:
- by Paul Verlaine (1844 - 1896), no title, written 1875?, appears in Sagesse, in Sagesse III, no. 13, first published 1880
See other settings of this text.
Available translations, adaptations or excerpts, and transliterations (if applicable):
- CHI Chinese (中文) [singable] (Dr Huaixing Wang) , copyright © 2024, (re)printed on this website with kind permission
- ENG English (Peter Low) , "Row upon row of hedges", copyright © 2000, (re)printed on this website with kind permission
1 Philippart-Gonzalez: "a envoyé"
Research team for this page: Emily Ezust [Administrator] , Christiane Garoux
12. C'est la fête du blé, c'est la fête du pain  [sung text not yet checked]
C'est la fête du blé, c'est la fête du pain Aux chers lieux d'autrefois revus après ces choses ! Tout bruit, la nature et l'homme, dans un bain De lumière si blanc que les ombres sont roses. L'or des pailles s'effondre au vol siffleur des faux Dont l'éclair plonge, et va luire, et se réverbère. La plaine, tout au loin couverte de travaux, Change de face à chaque instant, gaie et sévère. Tout halète, tout n'est qu'effort et mouvement Sous le soleil, tranquille auteur des moissons mûres, Et qui travaille encore imperturbablement À gonfler, à sucrer là-bas les grappes sures. Travaille, vieux soleil, pour le pain et le vin, Nourris l'homme du lait de la terre, et lui donne L'honnête verre où rit un peu d'oubli divin. Moissonneurs, -- vendangeurs là-bas ! -- votre heure est bonne ! Car sur la fleur des pains et sur la fleur des vins, Fruit de la force humaine en tous lieux répartie, Dieu moissonne, et vendange, et dispose à ses fins La Chair et le Sang pour le calice et l'hostie !
Text Authorship:
- by Paul Verlaine (1844 - 1896), no title, appears in Sagesse, in Sagesse III, no. 21
See other settings of this text.
Researcher for this text: Emily Ezust [Administrator]